Guerre d'Algérie: Macron va faire un geste envers les rapatriés

Le président français Emmanuel Macron va faire un geste mémoriel mercredi envers les rapatriés d'Algérie qui portera sur la fusillade de la rue d'Isly à Alger, dans laquelle des dizaines de partisans de l'Algérie française furent tués par l'armée en mars 1962.

AFRICA RADIO

25 janvier 2022 à 18h21 par AFP

Le chef de l'Etat va porter "une parole de reconnaissance" lors d'une rencontre à l'Elysée avec des associations de rapatriés d'Algérie, communément appelés les "pieds-noirs", a indiqué mardi la présidence française. "Un des points saillants du propos du président de la République tournera autour de ce qu'il s'est passé le 26 mars à Alger, rue d'Isly", a ajouté la présidence, sans plus de précisions. Une semaine après la signature des Accords d'Evian et le cessez-le-feu, le 19 mars 1962, en Algérie, des manifestants civils partisans de l'Algérie française avaient été mitraillés à un barrage tenu par l'armée française, alors qu'ils tentaient de forcer le passage vers le quartier de Bab El-Oued, dans le centre d'Alger. La fusillade qui dura plus de dix minutes fit 49 morts, tous civils, parmi les manifestants, selon le bilan officiel, plutôt 60 à 80 selon des historiens ou des médecins. Elle marqua le début de l'exode massif des pieds-noirs d'Algérie. Cette "reconnaissance" s'inscrit dans une série d'actes mémoriels, depuis le début du quinquennat de M. Macron et à l'approche du 60e anniversaire de la fin de la guerre d'Algérie, devenue indépendante le 5 juillet 1962. Le 14 septembre 2018, Emmanuel Macron a ainsi reconnu, "au nom de la République française", que le jeune mathématicien communiste Maurice Audin avait été "torturé à mort, ou torturé puis exécuté par l'armée française" en 1957. Le 3 mars 2021, il reconnaissait que l'avocat nationaliste Ali Boumendjel avait été "torturé et assassiné" le 23 mars 1957 par l'armée française, contredisant la version initiale d'un suicide. Le 20 septembre 2021, le chef de l'Etat a demandé "pardon" aux harkis, supplétifs algériens de l'armée française, qui furent "abandonnés" par la France. Un projet de loi, actant ce "pardon" et tentant de "réparer" les préjudices subis, est en cours d'examen en Parlement. Emmanuel Macron a aussi dénoncé des "crimes inexcusables pour la République" lors des 60 ans du massacre par la police française de manifestants algériens le 17 octobre 1961 à Paris. "L'objectif reste le même, construire à terme une mémoire apaisée, partagée, commune à tout ce qu'ont été jusque-là les mémoires liées à la guerre d'Algérie et à la colonisation", en reconnaissant la "singularité de chacun", a souligné l'Elysée. Outre les représentants d'associations, des artistes "pieds-noirs" emblématiques, dont le réalisateur Alexandre Arcadi et l'actrice Françoise Fabian, ont été conviés mercredi après-midi à l'Elysée. La rencontre s'ouvrira par un témoignage de Danielle Michel-Chiche, blessée à l'âge de cinq ans dans l'attentat du Milk Bar le 30 septembre 1956 à Alger et autrice de "Lettre à Zohra D", en référence à Zohra Drif qui déposa la bombe. Mme Michel-Chiche devint avocate puis sénatrice après l'indépendance. Les relations restent compliquées entre l'exécutif et les rapatriés depuis qu'Emmanuel Macron a qualifié la colonisation de "crime contre l'humanité" lors d'un déplacement à Alger en 2017. Nombre d'associations de rapatriés appellent au retrait de ces propos. Les échanges mémoriels restent en revanche au point mort avec l'Algérie. "La France a fait un certain nombre de gestes. La main est toujours tendue et le président attend que quelqu'un la prenne", fait observer l'Elysée.