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Le nouveau coronavirus a réussi, du moins momentanément, là où le régime algérien avait échoué: mettre fin aux marches du "Hirak", le mouvement populaire inédit qui ébranle le pouvoir depuis plus d'un an.

Mais ce soul&egrave;vement pacifique va survivre sous une forme diff&eacute;rente et rebondir &agrave; la fin de la pand&eacute;mie, pr&eacute;disent les analystes.
"Si le pr&eacute;sident&nbsp;(Abdelmadjid) Tebboune tire pour l'heure de cette crise un prestige in&eacute;dit, il risque de payer tr&egrave;s cher d'&eacute;ventuelles&nbsp;d&eacute;faillances dans la r&eacute;ponse publique &agrave; la pand&eacute;mie, d&eacute;faillances qui, le moment venu, pourraient relancer la contestation avec une vigueur renouvel&eacute;e", avertit l'historien Jean-Pierre Filiu, professeur &agrave; Sciences Po Paris.
La progression de la pand&eacute;mie en Alg&eacute;rie a oblig&eacute; les partisans du "Hirak" &agrave; appeler &agrave; suspendre les marches, rassemblements et autres activit&eacute;s militantes.
Pour la premi&egrave;re fois depuis le d&eacute;but de la contestation le 22 f&eacute;vrier 2019, les rues d'Alger &eacute;taient vides vendredi, pour la 57e marche hebdomadaire, alors qu'ils &eacute;taient encore des milliers dans les rues la semaine pr&eacute;c&eacute;dente malgr&eacute; les avertissements des autorit&eacute;s sanitaires.
Pour certains manifestants, il a fallu accepter que le virus n'&eacute;tait pas "une fabrication du pouvoir" pour casser le "Hirak", comme on a pu le dire sur les r&eacute;seaux sociaux.
"Demander la suspension du +Hirak+, ce n&rsquo;est pas le trahir.C&rsquo;est reconna&icirc;tre que dans la vie, il y a des priorit&eacute;s, la premi&egrave;re &eacute;tant la (bonne) sant&eacute; des gens", &eacute;crit le journaliste Akram Belka&iuml;d, dans sa chronique au Quotidien d'Oran, journal francophone ind&eacute;pendant.&nbsp;
"Le r&eacute;gime, lui, se frotte les mains &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;un croque-mort qui sent venir de bonnes affaires.Pour lui, seul compte la fin du +Hirak+.Ce qu&rsquo;il ne sait pas, c&rsquo;est que la col&egrave;re reviendra et elle sera bien plus forte", assure-t-il.

- "Maturit&eacute;" -

Le fait est que trois mois apr&egrave;s une pr&eacute;sidentielle massivement boycott&eacute;e et l'&eacute;lection d&rsquo;Abdelmadjid Tebboune, le pouvoir n'est toujours pas parvenu &agrave; venir &agrave; bout de ce mouvement de contestation non violent, pluriel et sans leadership.
Et tout indique que le "Hirak" va s&rsquo;adapter au nouveau contexte &eacute;pid&eacute;mique.
L&rsquo;interdiction officielle des manifestations, prononc&eacute;e mardi, a accompagn&eacute; la d&eacute;cision des partisans de la contestation de les suspendre.Mais elle ne l'a pas suscit&eacute;e.
Comme le souligne Louisa Dris-A&iuml;t Hamadouche, politologue &agrave; l'Universit&eacute; d'Alger, "cela r&eacute;v&egrave;le une maturit&eacute; et une conscience politique qui permet de classer les priorit&eacute;s".
"Cette auto-responsabilisation est r&eacute;v&eacute;latrice du fait que le +Hirak+ est un mouvement citoyen inscrit dans un processus de construction d'un ordre nouveau et pas seulement de contestation de l'ordre ancien", observe-t-elle.
Nombre de figures du "Hirak" critiquent l'&eacute;tat "totalement d&eacute;faillant" du syst&egrave;me de sant&eacute; et "l'improvisation comme mode de gouvernance".

- De "Silmiya" &agrave; "Sihya" -

De fait, beaucoup de&nbsp;professionnels de sant&eacute; craignent que les structures hospitali&egrave;res -d&eacute;j&agrave; sous pression- ne soient vite d&eacute;pass&eacute;es en cas de propagation massive de la pand&eacute;mie, qui a fait 17 morts dans ce vaste pays de quelque 45 millions d'habitants o&ugrave; plus de 200 cas de contamination ont &eacute;t&eacute; enregistr&eacute;s &agrave; ce jour.
"Le coronavirus ne va pas tuer le +Hirak+ mais mettre &agrave; nu les probl&egrave;mes du secteur de la sant&eacute; de notre pays", estime la sociologue Yamina Rahou, chercheuse au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC) d'Oran (nord-ouest).
Selon elle, le mouvement "sera appel&eacute; &agrave; se r&eacute;inventer.Les +hirakistes+ ne manquent ni d&rsquo;ing&eacute;niosit&eacute; ni d'intelligence.Ils vont&nbsp;s'exprimer sous d'autres formes et par d'autres actions".
En passant par exemple du mot d'ordre pour un mouvement "pacifique" ("silmiya") &agrave; une mobilisation "sanitaire" ("sihya"), gr&acirc;ce &agrave; des op&eacute;rations de sensibilisation et de solidarit&eacute; prophylactiques.
C'est ce que des jeunes ont d&eacute;j&agrave; commenc&eacute; &agrave; faire vendredi, comme dans le quartier populaire alg&eacute;rois de Bal El Oued.Au nom de la "mobilisation sanitaire",&nbsp;ils ont d&eacute;sinfect&eacute; les halls d'immeubles et les&nbsp;rideaux des magasins ferm&eacute;s et nettoy&eacute; les rues.
Pour le politologue Mohamed Hennad, "il est indispensable que la flamme du Hirak soit pr&eacute;serv&eacute;e.Beaucoup de propositions circulent: op&eacute;ration +Villes mortes+ les vendredis, concert de casseroles, intensification des &eacute;changes sur les r&eacute;seaux sociaux, etc.".&nbsp;
"Mais tout en gardant l'espoir de reprendre les marches le plus t&ocirc;t possible."

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