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Le meurtre d'un chanteur vedette, révélateur des tensions ethniques en Ethiopie

Comme chaque après-midi depuis plusieurs jours, Firaol Ajema et ses amis se sont réunis à Legetafo, près d'Addis Abeba, pour écouter ensemble les chansons de Hachalu Hundessa, chanteur vedette éthiopien récemment assassiné.

Tous ont rev&ecirc;tus des t-shirts noirs orn&eacute;s du portrait du chanteur et du slogan "Je suis aussi Hachalu", pour c&eacute;l&eacute;brer la m&eacute;moire de la vedette dont le meurtre, non &eacute;lucid&eacute;, a provoqu&eacute; une flamb&eacute;e de violence qui a fait plus de cent morts.
Un nombre ind&eacute;termin&eacute; de ces victimes ont &eacute;t&eacute; tu&eacute;es par les forces de s&eacute;curit&eacute; et d'autres dans des affrontements entre membres de diverses communaut&eacute;s.
Des violences qui mettent en lumi&egrave;re les tensions ethniques grandissantes en Ethiopie et soulignent la fragilit&eacute; de la transition d&eacute;mocratique mise en &oelig;uvre par le Premier ministre Abiy Ahmed, prix Nobel de la Paix 2019.
Depuis son accession au pouvoir, il s'est efforc&eacute; de r&eacute;former un syst&egrave;me jusque-l&agrave; tr&egrave;s autoritaire.Mais ce faisant, il a ouvert la porte aux violences intercommunautaires qui mettent &agrave; l'&eacute;preuve le syst&egrave;me &eacute;thiopien de f&eacute;d&eacute;ralisme ethnique.
"Nous n'avons pas pu porter le deuil comme nous l'aurions voulu", explique Firaol, un &eacute;tudiant.&nbsp;
"Le meurtre (d'Hachalu) nous a profond&eacute;ment attrist&eacute;s, mais la mani&egrave;re dont le gouverneement l'a g&eacute;r&eacute; a empir&eacute; les choses", approuve un de ses amis, Birhanu Gadis."C'est totalement inacceptable".

- Addis Abeba, ville symbole -

Bien qu'appr&eacute;ci&eacute; d'&Eacute;thiopiens d'origines diverses, Hachalu Hundessa a surtout &eacute;t&eacute; le porte-voix des Oromo, qui avaient d&eacute;nonc&eacute; leur marginalisation &eacute;conomique et politique lors des manifestations antigouvernementales ayant d&eacute;bouch&eacute; en 2018 sur l'arriv&eacute;e au pouvoir&nbsp;du Premier ministre Abiy Ahmed, un membre de cette communaut&eacute;.
Ses textes tr&egrave;s politiques exprimaient les frustrations de ce groupe ethnique, le plus important par le nombre, mais qui s'est longtemps estim&eacute; marginalis&eacute;s &eacute;conomiquement et politiquement.
Aujourd'hui, de nombreux nationalistes Oromo se sentent trahis par le Premier ministre, qu'ils accusent de ne pas faire suffisamment pour d&eacute;fendre les int&eacute;r&ecirc;ts de sa communaut&eacute;, et d'avoir laiss&eacute; les forces de s&eacute;curit&eacute; ouvrir le feu sur les manifestants, &agrave; Addis Abeba et en r&eacute;gion Oromia, le plus large des &Eacute;tats f&eacute;d&eacute;r&eacute;s &eacute;thiopiens, qui enserre la&nbsp;capitale.
Car Addis Abeba, que les Oromo appellent Finfinne, du nom du territoire de la ville avant sa cr&eacute;ation &agrave; la fin du XIXe si&egrave;cle par l'empereur Menelik II, est bien au coeur de la crise actuelle: situ&eacute;e en territoire oromo, elle dispose d'un statut sp&eacute;cial, et les Oromo estiment en avoir &eacute;t&eacute; d&eacute;plac&eacute;s au fil de l'Histoire.
C'est d'ailleurs un plan du gouvernement f&eacute;d&eacute;ral pr&eacute;voyant l'extension de la capitale vers l'Oromia qui avait d&eacute;clench&eacute; en 2015 les manifestations antigouvernementales.
Cette semaine, c'est le d&eacute;sir des nationalistes oromo de voir Hachalu &ecirc;tre inhum&eacute; &agrave; Addis Abeba, et non dans sa ville natale d'Ambo, &agrave; 100 km &agrave; l'ouest de la capitale, qui a mis le feu aux poudres.
"Hachalu devait &ecirc;tre enterr&eacute; &agrave; Addis Abeba.Finfinne appartient au peuple Oromo", mart&egrave;le Firaol.

- La statue de Menelik II -

Selon les autorit&eacute;s f&eacute;d&eacute;rales, des nationalistes oromo comptant dans leurs rangs un populaire dirigeant d'opposition, Jawar Mohammed, ont intercept&eacute; mardi la d&eacute;pouille d'Hachalu entre Addis Abeba, o&ugrave; le chanteur a &eacute;t&eacute; assassin&eacute;, et Ambo o&ugrave; il devait &ecirc;tre inhum&eacute;, pour le ramener dans la capitale, provoquant un affrontement avec la police et l'arrestation de Jawar Mohammed, qui a encore aggrav&eacute; les tensions.
Et jeudi, lors des fun&eacute;railles &agrave; Ambo, des soldats ont ouvert le feu sur un groupe vouant assister aux obs&egrave;ques, faisant deux morts.
Le mois dernier, Hachalu avait appel&eacute; au retrait de la statue prom&eacute;minente de l'empereur Menelik II, dans le quartier de Piasa de la capitale, d&eacute;sormais sous protection polici&egrave;re.
Si Menelik est respect&eacute; par beaucoup comme le fondateur de l'Ethiopie moderne, c'est de son r&egrave;gne que les nationalistes oromo datent le d&eacute;but de la marginalisation qu'ils d&eacute;noncent.
Pour Firaol, la mort d'Hachalu d'un c&ocirc;t&eacute;, la protection polici&egrave;re autour de la statue de Menelik de l'autre t&eacute;moignent des priorit&eacute;s que se fixe le gouvernement.
"Alors qu'ils auraient du prot&eacute;ger Hachalu, ils prot&eacute;geaient une statue.Hachalu n'&eacute;tait pas qu'un individu, il &eacute;tait comme les yeux du peuple Oromo.Maintenant, ils nous ont aveugl&eacute;s".

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