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Toboggan et ateliers derrière les murs de la prison pour femmes de Bamako

Ateliers de coiffure, confection de savons ou flânerie accrochée à un barreau: la prison pour femmes de Bollé à Bamako tranche singulièrement avec l'ordinaire carcéral sahélien, souvent surpeuplé et insalubre.

Une fois pass&eacute;s la haute porte rouill&eacute;e et les larges murs en pierre ocre, pas grand-chose ne renvoie au monde p&eacute;nitentiaire dans la seule prison du Sahel destin&eacute;e aux femmes, avec celle de Nouakchott en Mauritanie.
Des gardiens, et majoritairement des gardiennes, circulent certes entre les b&acirc;timents pos&eacute;s sur cette large parcelle emmur&eacute;e.Mais peu d'armes et de tenues r&eacute;glementaires s'offrent &agrave; la vue.Des femmes pilent le mil, des enfants jouent &agrave; la cr&egrave;che.
Plus aucun homme n'est admis apr&egrave;s 16H00.
La solidarit&eacute; est de mise entre les 144 d&eacute;tenues, dit Mariam S., la doyenne des d&eacute;tenues du centre de d&eacute;tention pour femmes et mineures."On se serre les coudes", raconte-elle, un voile recouvrant ses yeux noircis au mascara.
"Quand une nouvelle&nbsp;arrive, elle ne conna&icirc;t pas les exigences de la prison, alors on l'accompagne", dit-elle.
"On ne consid&egrave;re pas Boll&eacute; comme un centre de d&eacute;tention", explique Babou Togora, de la Direction nationale de l'administration p&eacute;nitentiaire.Il vante les ateliers qui forment les femmes &agrave; un futur m&eacute;tier, l'existence d'un terrain de basket et m&ecirc;me d'un cours de yoga.
L'histoire de la prison d&eacute;bute durant la r&eacute;volution de 1991, ann&eacute;e fondatrice au Mali.Le coup d'Etat qui renverse le dictateur Moussa Traor&eacute; met le pays sur la voie de la d&eacute;mocratie.Mais &agrave; la prison de Bamako, les prisonniers "ont profit&eacute; de la r&eacute;volution pour abuser des d&eacute;tenues", dit l'inspecteur Gabriel Flazan Sidib&eacute;, directeur adjoint de Boll&eacute;.

- Lenteur judiciaire -

D&eacute;cision est prise de cr&eacute;er un centre de d&eacute;tention &agrave; part.Il verra le jour en 1999, et reste &agrave; ce jour l'une des seules prisons exclusivement destin&eacute;es aux femmes dans la sous-r&eacute;gion.&nbsp;
Dans les autres prisons, au Mali et ailleurs, elles sont enferm&eacute;es dans des quartiers r&eacute;serv&eacute;s &agrave; l'&eacute;cart des hommes.Les femmes vou&eacute;es &agrave; la prison &agrave; Bamako, "on fait tout pour les regrouper ici", dit M. Sidib&eacute;.
De dures r&eacute;alit&eacute;s sah&eacute;liennes se cachent sous l'aspect presque plaisant de Boll&eacute;.Pris dans la tourmente s&eacute;curitaire et politique depuis des ann&eacute;es, le Mali reste aussi l'un des pays les plus pauvres au monde.Boll&eacute; tient debout gr&acirc;ce aux aides &eacute;trang&egrave;res.
"Il faut reconna&icirc;tre que sans l'appui des partenaires, la situation serait compliqu&eacute;e", admet Ibrahim&nbsp;Tonkara, directeur de l'administration p&eacute;nitentiaire, devant des repr&eacute;sentants du Programme de l'ONU pour le d&eacute;veloppement (PNUD) venus faire un don.
En raison d'une justice lente et sous-dot&eacute;e, une large majorit&eacute; des d&eacute;tenues n'ont jamais &eacute;t&eacute; jug&eacute;es.Deux tiers, dit la direction.
Agripp&eacute;e &agrave; un barreau de la cour, une prisonni&egrave;re engage la conversation."Hello, how are you ?" En anglais, la Nig&eacute;riane, qui veut rester anonyme, indique &ecirc;tre l&agrave; depuis un an et sept mois.Elle attend encore de passer devant un juge."C'est comme &ccedil;a ici", dit-elle en fran&ccedil;ais avec un lourd accent.
Sur les 144 d&eacute;tenues, 19 sont &eacute;trang&egrave;res, venues des pays alentour, mais aussi du Nigeria, du Zimbabwe, du Malawi..."Il y a tout ce que vous pouvez imaginer en termes d'infraction ici", dit le directeur adjoint Sidib&eacute;.

- La faute des mamans -

En majorit&eacute;, les femmes sont l&agrave; sous l'accusation de violences, meurtres, infanticides, coups et blessures, mais aussi de vol ou de participation au trafic d'&ecirc;tres humains et de drogue.Une d&eacute;tenue, lib&eacute;r&eacute;e il y quelques mois, &eacute;tait l&agrave; pour terrorisme.
Certaines sont entr&eacute;es en prison avec leur b&eacute;b&eacute; dans les bras.Dix-neuf enfants courent entre le toboggan et la table basse install&eacute;s dans la cr&egrave;che.
"Quand je suis arriv&eacute; ici, il &eacute;tait trop petit, et je ne pouvais pas le laisser avec sa soeur &agrave; la maison, elle a seulement 4 ans", explique Binta C., jeune femme d'une vingtaine d'ann&eacute;es condamn&eacute;e il y a deux ans pour escroquerie.
Le compagnon de Binta vient plusieurs fois par semaine leur rendre visite.Il emm&egrave;ne le petit Nabil, son fils, faire des tours en voiture dans le quartier.Quand il revient &agrave; la prison, le petit gar&ccedil;on pleure.
"Ils n'ont rien fait pour se retrouver ici, c'est leurs&nbsp;mamans qui ont faut&eacute;, il faut les aider", dit Moussa Bagayoko, de l'ONG Maya-Ton qui, sur des financements de m&eacute;c&egrave;nes, aide la prison.Ces financements sont de plus en plus rares, d&eacute;plore-t-il.
"L'erreur est humaine, personne n'est parfait dans la vie", avoue Mariam, condamn&eacute;e &agrave; 20 ans de r&eacute;clusion pour avoir tu&eacute; l'autre &eacute;pouse de son mari.&nbsp;
"Mais il faut une gr&acirc;ce pr&eacute;sidentielle, c'est trop long ici!", dit-elle.

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