Ouganda: libération sous caution pour un écrivain accusé d'insultes contre la famille du président

Un tribunal ougandais a ordonné mardi la libération sous caution du célèbre écrivain ougandais Kakwenza Rukirabashaija, accusé d'avoir insulté la famille du président Museveni, mais lui a interdit de parler à la presse.

AFRICA RADIO

25 janvier 2022 à 10h21 par AFP

Le juge a demandé la remise en liberté de M. Rukirabashaija contre une caution en espèces de 500.000 shillings ougandais (125 euros) et lui a ordonné de restituer son passeport. L'écrivain de 33 ans, dont les avocats affirment qu'il a été torturé après son arrestation le 28 décembre, a comparu par liaison vidéo depuis une prison de haute sécurité où il est détenu. Il est apparu faible et un gardien de prison a déclaré au juge que Kakwenza Rukirabashaija "se plaignait de douleur" et demandait à rester assis durant l'audience. Le juge a prévenu M. Rukirabashaija que s'il parlait à la presse avant la fin de l'affaire, sa caution "s'effondrerait automatiquement" et qu'il serait renvoyé en prison. Il a également ordonné que les procureurs bouclent leurs investigations d'ici vendredi et qu'ils soient prêts à exposer leurs positions lors de la prochaine audience prévue le 1er février. Des diplomates américains et européens assistaient à l'audition. A l'extérieur du tribunal, son avocat Eron Kiiza a déclaré aux journalistes qu'il pensait que les procureurs ne seraient pas prêts à temps. "Je doute qu'il (son client) fasse l'objet d'un procès complet", a-t-il estimé. L'avocat avait affirmé vendredi que plusieurs cicatrices constatées lors d'un examen médical mené sur son client à la prison constituaient des "marques évidentes de torture" et que sa détention depuis décembre était illégale. Kakwenza Rukirabashaija a été inculpé le 11 janvier de "communication offensante" envers le président au pouvoir depuis 1986 Yoweri Museveni et son fils, Muhoozi Kainerugaba, dans une série de publications Twitter. Il y qualifiait ce général, que beaucoup voient comme le successeur de son père âgé de 77 ans, d'"obèse" et de "rouspéteur". Les États-Unis, l'UE et des organisations de la société civile ont appelé à sa libération. Pourfendeur affiché du pouvoir ougandais, Kakwenza Rukirabashaija a publié en 2020 le roman satirique "The Greedy Barbarian" (non traduit en français), décrivant un pays imaginaire gangréné par la corruption, salué en 2020 par la critique. Il a été récompensé en 2021 du Prix PEN Pinter, attribué chaque année à un auteur persécuté pour avoir exprimé ses convictions. Vu comme un réformiste lors de sa prise du pouvoir, M. Museveni a depuis sévèrement réprimé toute dissidence et a modifié la Constitution pour pouvoir se faire réélire sans discontinuer.