Tunisie: enquête pour un décès "suspect" après la manifestation du 14 janvier

La justice tunisienne a ouvert mercredi une enquête, de même que l'Instance pour la prévention de la torture (INPT), après le décès d'un quinquagénaire, retrouvé évanoui lors d'une manifestation réprimée violemment par la police le 14 janvier, a appris l'AFP de sources concordantes.

AFRICA RADIO

19 janvier 2022 à 16h21 par AFP

Le tribunal de Tunis a lancé une enquête officielle concernant "le décès à l'hôpital Habib Thameur" mercredi, d'un homme que des militants du groupe "Citoyens contre le coup d'Etat" ont identifié comme Ridha Bouzayane, 57 ans, "décédé à la suite blessures graves à cause de la violence de la police lors de la manifestation" du 14 janvier. Ces opposants au président Kais Saied ont qualifié la victime de "martyr", tout comme des militants du parti d'inspiration islamiste Ennahdha qui participaient également aux protestations contre le coup de force du 25 juillet de M. Saied par lequel le président, dont Ennahdha est la bête noire, s'est arrogé les pleins pouvoirs. L'INPT s'est "auto-saisie" du dossier et a ouvert sa propre "enquête pour mort suspecte", a indiqué à l'AFP Lotfi Ezzedine, un responsable de cette autorité publique indépendante. Selon un communiqué du tribunal de Tunis, "une ambulance de la protection civile a ramené le 14 janvier une personne retrouvée évanouie près du Palais des congrès" qui borde l'avenue Mohamed V où étaient concentrés la majorité des manifestants. Une autopsie a été ordonnée, a indiqué le tribunal, en ajoutant que, "selon les premières constatations, le corps de l'homme ne présentait pas de traces de violences visibles". Selon Samir Dilou, ex-député d'Ennahdha, M. Bouzayane, un dentiste père de trois enfants, avait quitté son domicile pour participer à la "fête de la Révolution", marquant la chute et la fuite de l'ex-dictateur Zine El Abidine Ben Ali, en 2011. "Ses enfants l'ont attendu pendant cinq jours. Il n'est pas rentré. Aujourd'hui, ils iront le voir une dernière fois avant son enterrement", a indiqué M. Dilou sur Facebook. Une vingtaine d'ONG tunisiennes ont dénoncé mardi la "répression policière" des rassemblements du 14 janvier, interdits officiellement pour des raisons sanitaires. Dans des scènes d'une violence rare à Tunis depuis 10 ans, les policiers ont chargé à grand renfort de canons à eau et gaz lacrymogènes, et procédé à des dizaines d'arrestations musclées de militants et de journalistes qui ont été pour certains malmenés et frappés.