Culture: Faut-il imaginer le futur de la mode sans les mannequins humains?

Faut-il imaginer le futur de la mode sans les mannequins humains? Tandis que le créateur de Shudu Gram, le photographe britannique blanc Cameron James Wilson, est taxé de plagiat racial par quelques détracteurs issus de la communauté 3.0, le premier supermodel virtuel fait sensation auprès des coqueluches de la mode.

9 janvier 2023 à 12h20 par Karidja Konaté Abidjan

Plus d’un an que le compte d’une mannequine attire « likes » et « followers ». Cette mannequine, c’est Shudu Gram, dont l’âge annoncé est de 28 ans. Elle est suivie par plus de 100 000 personnes sur Instagram.Sur son compte, une vingtaine de publications ont suscité 10 000 réactions par post en moyenne. Pour certains, elle est la diversité, elle est fascinante. Pour d’autres, elle est un danger, une impostrice. Car la particularité de Shudu Gram, c’est qu’elle est une mannequine virtuelle au corps redimensionné et au cou princier, qui prend racine dans un vieil archétype : la poupée. Beauté figurative et insondable. Peau noire, sans aucun défaut.


Créée à partir d'effets spéciaux générés par ordinateur, Shudu Gram est la création artistique du photographe londonien Cameron-James Wilson qui a souhaité donner vie à un fatasme qui deviendrait la réalité dans un monde filtré où le réel devient faux. Des rouages technologiques qui ne sont pourtant pas au goût de tout le monde. La communauté afro a été la première à s’enflammer sur les réseaux sociaux, accusant le concepteur de Shudu, de reprendre les ressorts du blackfacing digital, soit l’utilisation par des Blancs de GIFs représentant des personnes noires – des images souvent stéréotypées et aux relents postcoloniaux -, pour réagir à des phénomènes de société ou traduire son humeur du jour sur les réseaux sociaux.


Avec sa peau ébène, ses cheveux courts et son cou princier, Shudu n’est pas sans rappeler la Sud-Soudanaise Alek Wek et sa successeure, Duckie Thot : deux top models plébiscités par la fashion sphère. Le créateur a confié à cet effet auprès de plusieurs médias être fan de Grace Jones, et s’être inspiré du modèle de Barbie sud-africain dont il est à l’origine, puisant lui-même son héritage dans l’imaginaire des femmes Ndebele.


Ce pur produit marketing fait sensation auprès d’un public non content de voir plus de diversité dans le monde de la mode. Lequel va jusqu’à réclamer d’autres créations comme des models asiatiques, au grand dam d’une autre frange de la communauté qui appelle à la représentativité de mannequins africains ou afrodescendants en chair et en os.