Somalie: accord pour un passage au suffrage universel direct dès 2024

La Somalie a lancé une refonte de son système politique, avec un accord signé dimanche entre le gouvernement et les Etats fédérés prévoyant l'instauration du suffrage universel à partir de 2024 et le passage à un régime présidentiel.

28 mai 2023 à 10h21 par AFP



Mogadiscio (AFP)

Cet accord entend concrétiser la promesse souvent répétée mais jamais aboutie du vote sur le principe d'"une personne, une voix" dès l'année prochaine, pour les élections locales prévues le 30 juin 2024, avant les élections pour désigner les parlements et présidents régionaux le 30 novembre 2024.

Exception faite de la région séparatiste du Somaliland, ce pays fragile de la Corne de l'Afrique, indépendant depuis juillet 1960, n'a plus connu d'élections au suffrage universel depuis 1969, quelques mois avant la prise du pouvoir par le dictateur Siad Barré.

Les élections se déroulaient jusqu'à présent selon un complexe système indirect, construit autour de la myriade  des clans et sous-clans qui composent la société somalienne.

Ce système était régulièrement source de tensions, de luttes de pouvoir et d'instabilité qui, selon de nombreux observateurs, profitaient à l'insurrection des islamistes radicaux shebab qui ensanglante le pays depuis 2007.

Elu en mai 2022, le président somalien Hassan Cheikh Mohamoud avait promis en mars dernier que les prochaines élections nationales et régionales se tiendraient sur le principe d'"une personne, une voix".

Un premier pas avait été fait la semaine dernière dans l'Etat semi-autonome du Puntland, où des élections aux conseils de district se sont tenues sur ce principe.Ce scrutin avait été salué et cité en exemple par la communauté internationale.

- Régime présidentiel -

Cet accord a été conclu à l'issue de quatre jours de réunion du Forum consultatif national, qui ont notamment réuni le président Hassan Cheikh Mohamoud, le Premier ministre Hamza Abdi Barre et les dirigeants des Etats fédérés.

Le président de l'Etat du Puntland, Said Abdullahi Deni, bien que membre de ce Forum, n'était toutefois pas présent pour signer le texte. 

Au-delà du mode de scrutin, cet accord dessine une refonte plus large du système politique somalien, avec l'instauration d'un régime présidentiel à la place du régime parlemenaire actuel. 

"Afin d'harmoniser les élections de la République fédérale de Somalie, le pays adoptera un système de président et vice-président.Le président et le vice-président seront élus sur un seul bulletin (...) sur la base du système multipartite", annonce-t-il.

Ce système de "ticket présidentiel" met fin implicitement au poste de Premier ministre.La prochaine élection présidentielle est prévue en mai 2026.

Les élections aux conseils locaux serviront de base pour les élections au niveau national, qui se tiendront à la "proportionnelle avec liste fermée".

"Les deux partis politiques avec la majorité des voix (aux élections locales, ndlr) seront des partis politiques nationaux qui concourront pour les sièges au Parlement et du président", explique l'accord.

- Insurrection islamiste -

La Somalie vit dans l'instabilité chronique depuis des décennies.

Après la chute du dictateur Siad Barré en 1991, le pays a sombré dans la guerre civile, suivie depuis 2007 d'une sanglante insurrection menée par les islamistes radicaux shebab. 

Ce groupe affilié à Al-Qaïda combat depuis plus de quinze ans le gouvernement fédéral soutenu par la communauté internationale, afin d'instaurer la loi islamique en Somalie.

Chassés des principales villes en 2011-2012, les shebab restent solidement implantés dans de vastes zones rurales.

Le président Hassan Cheikh Mohamoud leur a déclaré une "guerre totale" et lancé en septembre une offensive militaire, appuyée par la force de l'Union africaine (Atmis) et par des frappes aériennes américaines.

Ces opérations ont permis de reconquérir de vastes territoires du centre du pays.Mais les shebab continuent de mener des attentats sanglants en représailles.Leur dernière attaque a visé le 26 mai une base de l'Atmis tenue par des soldats ougandais.

Le pays est aussi particulièrement vunérable aux aléas climatiques extrêmes récurrents, dont une sécheresse historique débutée fin 2020 et des inondations ces dernières semaines qui ont déplacé des centaines de milliers de personnes.