« La dangerosité (du chlordécone aux Antilles) est encore là pour plusieurs siècles »
C'est ce que souligne Pierre Yves Chicot , avocat , maître de conférences HDR (Habilité à diriger les recherches) à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe interrogé par Lilianne Nyatcha . Il analyse la décision du tribunal administratif de Paris qui a condamné l’État français pour des négligences fautives dans l'affaire de la pollution au chlordécone aux Antilles.
13 juillet 2022 à 13h16 par Lilianne Nyatcha Africa radio
Pourriez-vous d'abord nous
Il s’agit d’un produit toxique qui s’appelle le chlordécone ou la chlordécone. On n’est pas tout à fait d’accord si c’est le ou la. Peu importe c’est un produit extrêmement toxique qui a été utilisé dans les champs de bananes à cause d’un nuisible qu’on appelle le charançons . Il se trouve que ce produit très toxique a été utilisé dans les champs de banane en Guadeloupe. Ce produit avait déjà été révélé aux États-Unis comme un produit très dangereux notamment pour la santé des hommes, des plantes et des animaux. Mais ce produit a encore été utilisé en France à la demande des producteurs de bananes.
On rappelle que le chlordécone a été classé comme cancérigène dès 1979 par l'OMS ( Organisation Mondiale de la Santé), Interdit aux États Unis en 77 et seulement en 1990 en France métropolitaine ….
Par la suite, on a appris en France, de façon générale, les conséquences que ça pu avoir sur la santé. Donc il y a eu ce qu’on appelle désormais en droit de l’environnement, des mobilisations citoyennes, des tentatives de faire des procès puisque même alors que le produit était interdit ailleurs car sa dangerosité était connue, il a quand même été utilisé
C’est-à-dire, l'utilisation
Absolument, du fait que la dangerosité était
Les associations demandaient
on peut tenter de l'
des recours indemnitaires. L'autre réponse qui a été adoptée mais qui n’est pas sur le plan judiciaire c’est le fait que, ça on l'a pas encore dit, c’est que ce pesticide fait
Et ce cancer de la prostate lié au chlordécone a également été reconnu comme une maladie professionnelle en décembre 2021 ….
Oui tout à fait, c’est exactement ce que je dis. Au-delà du plan du choix de la réparation par la mise en place du plan chlordécone ; dont le dernier est plan chlordécone quatre. L’autre élément de réparation c’est précisément la reconnaissance de la maladie professionnelle qui, comme vous l’imaginez, n’a pas été une initiative forcément spontanée. Il a fallu l’action des syndicalistes pour qu'on puisse arriver à un pareil résultat.
En mentionnant ces actions menées par le pouvoir central, voulez-vous dire qu’elles vous semblent suffisantes face à l’ampleur des conséquences sur les populations?
Ce qu’il faut dire c’est citer l’article 204 du code civil : celui qui crée un dommage est tenu de le réparer. Donc le fait que le tribunal administratif de Paris vienne dire aujourd’hui qu’il y a une abstention fautive de la part de l’État ou une négligence fautive, ça veut dire qu’on peut envisager de mettre en œuvre le mécanisme de l’article 12 40 du code civil : celui qui crée un dommage est tenu de le réparer et donc on ne peut considérer aujourd’hui, au-delà des efforts qui ont déjà été enregistrés, des progressions qui ont été enregistrées. On ne peut pas considérer en tout et en premier que chaque victime a été indemnisée ou a été considérée parce que vous
Donc selon vous, l’indemnisation des victimes est indispensable d’autant plus qu’une étude de l'inserm de juin 2021 a confirmé une présomption de chlordécone de la population générale et le risque de cancer de la prostate ?
Bien sûr, la question de la dangerosité, et d’ailleurs le Président de la République réélu avait eu une phrase malheureuse en disant que la nature cancérogène du produit n’avait pas été établie en contredisant ainsi les professeurs de médecine qui en avaient fait la démonstration. Bien entendu la dangerosité est encore là pour plusieurs siècles.