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Experts de l'ONU assassinés en RDC: après 4 ans de procès, décision attendue samedi

La justice militaire congolaise prévoit de rendre samedi sa décision dans le procès du meurtre de deux experts de l'ONU en 2017 au Kasaï (centre de la RDC), après plus de quatre ans d'audiences qui n'ont pas répondu à toutes les questions sur ce double assassinat.

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28 janvier 2022 à 12h21 par AFP

Kananga (RD Congo) (AFP)

Dans ses réquisitions, le 30 novembre, le ministère public a demandé la peine de mort contre 51 des 54 accusés, dont 32 ont comparu, les autres étant jugés par défaut car en fuite. 

Parmi les charges retenues figurent: crimes de terrorisme, crimes de guerre par mutilation, meurtres, participation à un mouvement insurrectionnel...

Les experts onusiens Michael Sharp, de nationalité américaine, et Zaida Catalan, suédoise, avaient disparu le 12 mars 2017, alors qu'ils étaient au Kasaï pour enquêter sur des fosses communes liées au conflit armé qui avait éclat�� dans la région après la mort du chef coutumier Kamuina Nsapu, tué par les forces de sécurité. 

Ce conflit a fait 3.400 morts et des dizaines de milliers de déplacés entre septembre 2016 et mi-2017.

Leurs corps avaient été retrouvés dans un village deux semaines après, le 28 mars 2017.La jeune femme avait été décapitée.

Selon la version officielle, ils ont été exécutés dès le 12 mars 2017 par des miliciens de la secte Kamuina Nsapu. 

Mais, en juin 2017, un rapport remis au Conseil de sécurité de l'ONU estimait que ce double meurtre était un "guet-apens prémédité" et n'excluait pas l'implication de membres de la sécurité d'État.

Durant le procès, il a été avancé que les miliciens Kamuina Nsapu avaient tué les experts pour se venger de l'ONU, à qui ils reprochaient de ne pas avoir empêché l'armée de les attaquer.Mais les débats n'ont pas permis d'identifier d'éventuels commanditaires.

- Collusion avec les miliciens -

Parmi les accusés contre lesquels la peine capitale a été requise figure un colonel, Jean de Dieu Mambweni.Le ministère public l'accuse de collusion avec les miliciens, auxquels il est notamment soupçonné d'avoir fourni des munitions.Il lui est aussi reproché d'avoir reçu les deux experts sans l'autorisation de sa hiérarchie.

Le colonel Mambweni clame son innocence et ses avocats ont plaidé l'acquittement, affirmant que leur client n'avait "jamais collaboré avec des miliciens, ni contribué à leur entreprise criminelle".

"Ce sont les experts qui sont venus chercher le colonel chez lui, ça n'a jamais été sur rendez-vous", ont affirmé les avocats, accusant un magistrat militaire d'avoir manipulé des accusés pour les convaincre d'incriminer le colonel."C'est un procès monté, tout a été planifié pour charger Mambweni et déclarer que c'était un crime d'État", a plaidé un des avocats.

Des peines de 20 ans de prison ont été requises contre trois accusés qui, selon le ministère public, doivent bénéficier de circonstances atténuantes car ayant collaboré avec la justice.

Régulièrement prononcée, notamment dans les affaires impliquant des groupes armés, la peine de mort n'est plus appliquée en RDC depuis un moratoire décidé en 2003, et systématiquement commuée en condamnation à la perpétuité.

Le procès avait commencé le 5 juin 2017 mais a connu plusieurs interruptions.Au moins deux accusés sont morts en détention et, devant les lenteurs de la justice militaire, l'ONU avait désigné un expert judiciaire pour accompagner la procédure.

L'arrêt attendu de la cour militaire de Kananga, chef-lieu de la province du Kasaï central, sera susceptible d'appel auprès de la haute cour militaire de Kinshasa.