Mali: un imam influent met en garde la junte militaire sur la "gestion actuelle"

Un imam influent du Mali, qui a été à la tête de manifestations antigouvernementales massives l'année dernière, a mis en garde la junte militaire au pouvoir sur la "gestion actuelle" du pays, qui "ne va pas", s'adressant au colonel Assimi Goïta.

AFRICA RADIO

28 novembre 2021 à 20h51 par AFP

Mahmoud Dicko, un imam formé en Arabie saoudite, a été considéré comme la figure de proue des manifestations de 2020 contre le président Ibrahim Boubacar Keïta, qui ont mené à son évincement par un putsch. Le Mali est dans la tourmente depuis lors, et le colonel Goïta, 37 ans, est la cible des critiques internationales depuis qu'il a démis le gouvernement transitoire civil en mai lors d'un second putsch. L'imam, qui était resté discret depuis les manifestations de 2020, a déclaré lors d'une conférence de presse à Bamako qu'il se sentait obligé d'intervenir. "Je ne peux pas me taire sur la gestion actuelle du pays, j'ai été acteur du changement, des gens sont morts devant ma porte et devant ma mosquée. Je ne peux pas rester en dehors de la suite", a-t-il déclaré, ajoutant avoir demandé en vain une audience au colonel Goïta. "Je vois que ça ne va pas. C'est pourquoi j'ai décidé de prendre la parole", a-t-il dit. "On ne s'entend pas entre nous, on est pas avec le reste du monde. Il faut qu'on se donne la main sinon le pays n'est pas sur la bonne voie". "L'isolement actuel du pays ne peut pas continuer", a-t-il ajouté. Il a souligné qu'il n'appelait pas à manifester ni à renverser le pouvoir actuel. Les "assises nationales" qui devaient se tenir en décembre et à l'issue desquelles la junte au pouvoir devait fixer la date des élections, ont été reportées sine die la semaine dernière. Le Premier ministre installé par la junte, Choguel Kokalla Maïga, insiste sur la tenue de ces Assises pour décider des suites de la transition et de la tenue d'élections censées garantir un retour à un pouvoir civil. Malgré la pression d'une partie de la communauté internationale,Bamako a récemment notifié à la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) que le Mali serait dans l'incapacité d'organiser ces éléctions en février 2022, évoquant notamment l'insécurité criante dans les régions. Le Mali est le théâtre depuis 2012 d'un conflit lancinant avec des attaques répétées de groupes jihadistes affiliés à Al-Qaïda et à l'organisation Etat islamique, doublées de violences contre les civils perpétrées par des groupes armés, certains autoproclamés d'autodéfense. Les forces régulières sont également fréquemment accusées d'exactions.