Les ponts et les rues menant au complexe militaire, situé dans le centre de Khartoum, sont noirs de monde, selon des correspondants de l'AFP sur place.
Dans une ambiance festive, des chants révolutionnaires résonnent à travers des enceintes sur le lieu du sit-in, où campent depuis le 6 avril des milliers de Soudanais.
"Que tu chutes ou non, nous resterons", scandent les contestataires, en référence au Conseil militaire de transition qui a succédé au président Omar el-Béchir, destitué en avril par l'armée à la suite d'un mouvement de contestation populaire inédit déclenché en décembre.
Les deux camps se sont jusqu'à présent mis d'accord pour établir un Conseil conjoint militaro-civil, appelé aussi Conseil souverain, pour remplacer le Conseil militaire mais les négociations achoppent sur le nombre de membres et sa composition, chaque partie insistant pour être majoritaire dans cet organe.
Certains manifestants soulignent le risque d'impasse dans la crise.
- Délai de 72 heures -
"Si le Conseil militaire a la majorité dans le conseil souverain, les droits des civils ne seront pas garantis (⬦) Mais si le sit-in se poursuit encore longtemps, des divisions apparaitront qui serviront les objectifs des militaires", note Hassan Rabeh, un manifestant de Gadaref (centre).
L'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), qui regroupe les principales formations du mouvement de protestation, a présenté jeudi au Conseil militaire un document proposant d'établir une administration civile, avec des organes exécutif, législatif et judiciaire.
Satea al-Haj, un des chef du mouvement, a déclaré à des journalistes que l'ALC voulait une réponse du Conseil à cette demande d'ici "72 heures".
Dans un communiqué, le Conseil militaire a indiqué qu'il examinerait le document."Nous poursuivrons notre dialogue avec l'Alliance", a-t-il souligné.
Mardi, le général Salah Abdelkhalek, membre du Conseil militaire, a annoncé que le chef de cette instance, Abdel Fattah al-Burhane, serait "le chef du (futur) Conseil souverain".
Fer de lance de la contestation, l'ALC a alors accusé les militaires de "ne pas envisager sérieusement de céder le pouvoir au peuple" et appelé "à une marche d'un million" de manifestants jeudi pour réclamer un pouvoir civil.
La situation s'est d'autant plus tendue que les militaires ont annoncé mardi la mort de six membres des forces de sécurité, tués dans des heurts avec les manifestants à travers le pays.
Le Conseil militaire a prévenu qu'il ne laisserait pas le chaos s'installer, exhortant les manifestants à retirer les barricades installées et à rouvrir les routes et ponts bloqués aux alentours du QG de l'armée.
Dans un entretien mercredi à l'AFP, Sadek al-Mahdi, le leader de l'opposition, a mis en garde les meneurs de la contestation contre toute tentative de provoquer les militaires.
"Si nous provoquons (...) les forces armées qui ont contribué au changement, cela revient à chercher les ennuis", a-t-il ajouté.
- "Pillages, violences" -
Cet ancien Premier ministre, évincé du pouvoir en 1989 par le coup d'Etat mené par M. Béchir avec le soutien des islamistes, a assuré que le Conseil militaire n'allait pas tarder à transférer le pouvoir aux civils.
Pour sa part, le général Chamseddine Kabbachi, porte-parole du Conseil militaire, a fait état de "pillages, de violences sur des citoyens, de routes bloquées, d'attaques contre les forces de sécurité".
"Les forces armées doivent rester au sein du Conseil souverain" en raison des tensions que traversent le pays, a affirmé mardi M. Kabbachi.
Le Conseil militaire de transition a jusque-là résisté aux appels à céder le pouvoir et les manifestants, qui ont reçu le soutien de Washington, l'ont accusé de ne pas être si différent de l'ancien régime.
Parmi ses autres revendications, l'ALC a indiqué vouloir aussi aussi des représentants des groupes rebelles armés dans la "structure de transition civile", selon Khalid Omar Youssef, un chef de l'ALC.
Depuis plus de 15 ans, le Soudan est le théâtre d'insurrections dans les régions du Kordofan-Sud (sud), du Nil-Bleu (sud-est) et du Darfour (ouest).
Dans cette dernière région, où les violences ont nettement baissé ces dernières années, le conflit entre pouvoir et rebelles des minorités ethniques a fait plus de 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés, selon l'ONU.
La Cour pénale internationale (CPI) a lancé deux mandats d'arrêt contre M. Béchir pour qu'il réponde d'accusations de génocide, crimes de guerre et contre l'humanité lors du conflit au Darfour.
De nombreux habitants du Darfour estiment que leur demande de justice vis-à-vis des responsables de l'ancien régime devrait être une des priorités des leaders de la contestation.
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