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Au Mali, HRW dénonce "une vague d'exécutions de civils", des pillages

L'ONG Human Rights Watch (HRW) a dénoncé dans un rapport à paraître mardi une "nouvelle vague d'exécutions de civils" ainsi que des pillages par l'armée malienne et les jihadistes dans le centre et le sud-ouest du Mali.

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14 mars 2022 à 16h36 par AFP

Le document, dont l'AFP a consulté une copie lundi, fait état de la mort d'"au moins 107 civils" depuis le mois de décembre, "pour la plupart exécutés sommairement", dont "des commerçants, des chefs de villages, des responsables religieux et des enfants". HRW, qui se fonde sur les témoignages de 49 personnes, dont "des chefs communautaires, des commerçants, des gens du marché, du personnel médical, et des diplomates étrangers", affirme qu'au moins 71 civils ont été tués par des "membres des forces gouvernementales" et 36 par des "jihadistes". Ces victimes s'ajoutent, selon l'ONG, aux centaines d'autres civils tués depuis le début des troubles au Mali en 2012. Les violences ont fait plus de 320.000 personnes déplacées, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). En plus des agissements des groupes armés affiliés à Al-Qaïda et à l'organisation Etat islamique, des violences intercommunautaires et des actes crapuleux, l'armée est régulièrement accusée d'exactions. Le gouvernement de transition, issu de deux coups d'Etat militaires en août 2020 et en mai 2021, rejete systématiquement les accusations d'exactions visant l'armée malienne. Corinne Dufka, directrice pour le Sahel à HRW, citée dans le document de cette ONG, évoque une "hausse dramatique" du nombre de civils tués avant d'ajouter que les exactions répertoriées devraient "faire l'objet d'enquêtes et les personnes impliquées devraient être punies". Parmi les exactions attribuées à des groupes jihadistes, HRW cite le massacre en décembre 2021 de 32 personnes qui se trouvaient à bord d'un bus reliant Songho à Bandiagara (centre). Un témoin rapporte à l'ONG qu'un groupe de jihadistes a ouvert le feu sur le bus, "qui s'est renversé avant de s'enflammer". Parmi les exactions attribuées aux forces de sécurité maliennes, HRW évoque des "pillages et meurtres extrajudiciaires" lors d'opérations militaires. Le rapport évoque ainsi "l'exécution sommaire de 14 villageois dogons par des militaires de l'armée malienne", le 27 janvier à Tonou (centre), à la suite de la mort de deux soldats tués par un engin explosif improvisé. Selon les témoignages d'autres villageois, six personnes, dont le chef du village et un adolescent, ont été tuées sur les lieux où avait détonné l'engin explosif. Les autres ont été tués dans et aux abords du village. A plusieurs reprises, les témoins mentionnent des vols, notamment de bijoux, de la part des soldats. HRW, qui a adressé au gouvernement malien les conclusions de son rapport le 4 mars, affirme avoir reçu une réponse le 11 mars précisant que "la gendarmerie avait ouvert des enquêtes" sur deux des incidents où l'armée est mise en cause. Une enquête a été ouverte sur un troisième incident pour lequel 35 morts ont été recensés à Danguèrè Wotoro près de Ségou (centre), mais le gouvernement qualifie les accusations d'exécution de "fake news (...) dont l'objectif est de discréditer" l'armée malienne. Par ailleurs, le rapport mentionne dans un incident le 14 janvier dans les villages de Feto et Wouro Gnaga, dans la région de Ségou, la présence de soldats "blancs". Cinq civils ont été exécutés dans cet incident, dont deux personnes âgées, selon HRW. La France et ses partenaires européens affirment que la junte arrivée au pouvoir à Bamako a fait appel ces derniers mois au groupe privé russe Wagner, qui n'est toutefois pas cité nommément par HRW.