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Génocide au Rwanda : un des derniers fugitifs recherchés arrêté en Afrique du Sud

Un des quatre derniers fugitifs recherchés pour leur rôle dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 a été arrêté mercredi en Afrique du Sud et sera jugé, ont annoncé jeudi les procureurs de l'ONU enquêtant sur le dossier.

AFRICA RADIO

25 mai 2023 à 14h06 par AFP

La Haye (AFP)

Fulgence Kayishema est notamment accusé d'avoir assassiné, avec d'autres individus, plus de 2.000 hommes, femmes, personnes âgées et enfants réfugiés dans l'église de Nyange vers ou le 15 avril 1994.

Il "a été arrêté hier après-midi", ont indiqué les procureurs du  Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux (le "Mécanisme"), chargé d'achever les travaux du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). 

Recherché pour son rôle dans le génocide de 100 jours qui avait causé la mort de 800.000 Tutsi et Hutu modérés, il était en fuite depuis 2001, ont-ils souligné dans un communiqué.

Ancien inspecteur de police né en 1961 selon le tribunal, il a été inculpé de génocide, de complicité de génocide, de complot en vue de commettre le génocide et de crimes contre l'humanité.

Selon l’acte d’accusation, M. Kayishema est responsable, ou subsidiairement complice, de meurtre ou d’atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres de la population tutsie entre le 6 et le 20 avril 1994.

- Bulldozer -

L'accusé aurait selon les procureurs "directement participé à la planification et à l'exécution" du "massacre" de l'église de Nyange, dans la commune de Kivumu, "notamment en se procurant et en distribuant de l'essence pour incendier l'église avec les réfugiés à l'intérieur".

"Lorsque cela a échoué, M. Kayishema et d'autres ont utilisé un bulldozer pour que l'église s'effondre, enterrant et tuant les réfugiés à l'intérieur", ont précisé les procureurs.

Dans les jours qui suivirent, l'accusé et d’autres personnes auraient selon l'accusation supervisé le transfert des cadavres depuis l’église vers des fosses communes.

L'arrestation de M. Kayishema "garantit qu’il sera traduit devant la justice pour les crimes dont il est accusé", a salué le procureur du Mécanisme Serge Brammertz, cité dans un communiqué.

"Aujourd’hui est un jour dédié à la mémoire des victimes et des survivants du génocide" qui, 29 ans après, "continuent de porter les cicatrices physiques et mentales de leur souffrance", a-t-il souligné.

- Alias et faux documents -

M. Kayishema a utilisé de nombreux alias et faux documents et s'est appuyé "sur un réseau de soutiens de confiance" pour dissimuler son identité et sa présence, selon les procureurs. 

Parmi ces soutiens se trouvaient notamment des membres de sa famille, des membres des ex-Forces Armées Rwandaises et des Forces Démocratiques de Libération du Rwanda, ont-ils indiqué.

L'arrestation a eu lieu à Paarl dans le cadre d'une opération avec les autorités sud-africaines à la suite d'une longue enquête menée dans plusieurs pays, selon les procureurs.

De nombreux Rwandais ont été condamnés par la justice de leur pays, la justice internationale ou celle de pays occidentaux pour des faits liés au génocide des Tutsi en 1994.

Le TPIR a condamné 62 personnes, infligeant notamment 30 ans de réclusion à l'ancien ministre rwandais Augustin Ngirabatware.

L’équipe de recherche du Bureau du Procureur du Mécanisme a précisé avoir trouvé la trace de cinq fugitifs depuis 2020.

Parmi ceux-ci se trouvent Augustin Bizimana, l'un des principaux architectes du massacre, ainsi que Protais Mpiranya et Phéneas Munyarugarama, qui sont morts sans avoir affronté la justice internationale.

Le procès de Félicien Kabuga, financier présumé du génocide au Rwanda en 1994, a ouvert en septembre 2022, mais été suspendu en mars le temps de décider s'il est en assez bonne santé pour rester sur le banc des accusés.

Il ne reste aujourd’hui que trois fugitifs sous la juridiction du Mécanisme, selon le tribunal.