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Présidentielle en Centrafrique : "Les élections sont déjà contestées avant qu’elles n’aient lieu", selon le journaliste Jean-Fernand Koena

Actus. Jean-Fernand Koena est journaliste centrafricain, correspondant pour la Deutsche Welle et Associated Press. Il était l’invité d’Africa Radio mardi 30 décembre 2025 à 07h45.

Présidentielle en Centrafrique : "Les élections sont déjà contestées avant qu’elles n’aient lieu", selon le journaliste Jean-Fernand Koena
Jean-Fernand Koena, journaliste centrafricain.

Près de 2,5 millions de Centrafricains étaient appelés aux urnes dimanche 28 décembre pour un quadruple scrutin majeur. Si les autorités ont mis en avant un vote calme après des années de crises, des contestations ont émergé avant même la fermeture des bureaux. Pour Jean-Fernand Koena, journaliste centrafricain et correspondant de la Deutsche Welle et de l’Associated Press, les tensions politiques et l’absence de véritables débats de fond fragilisent le processus électoral. 

Ecoutez Jean-Fernand Koena

 

Un scrutin organisé dans un pays marqué par les crises 

Après des décennies d’instabilité politique et sécuritaire, les autorités centrafricaines ont voulu faire de ce scrutin un symbole de normalisation. Selon Jean-Fernand Koena, l’objectif affiché était clair : montrer que la République centrafricaine est capable d’organiser des élections apaisées. « L’objectif des autorités était d’organiser un scrutin apaisé, qui conforte la République centrafricaine, qui a une histoire de crises », explique-t-il. Cette dynamique s’inscrit, selon lui, dans les résolutions issues du Forum de Bangui, qui avait appelé à renforcer la décentralisation et à rapprocher l’administration des citoyens. « C’est au regard de toutes ces crises que les Centrafricains ont décidé (…) d’aller résolument vers les élections locales, tendant à rapprocher l’administration des citoyens et de décentraliser le pouvoir », souligne le journaliste.

Une contestation déjà présente avant les résultats 

Malgré le calme observé le jour du vote, les tensions politiques n’ont pas disparu. Bien au contraire. Pour Jean-Fernand Koena, la contestation du processus électoral a précédé même l’ouverture des bureaux de vote. « Les élections sont déjà contestées avant qu’elles n’aient lieu », affirme-t-il. Il rappelle que le chef de l’opposition, Anicet-Georges Dologuélé, a tenu une conférence de presse en pleine période de silence électoral pour remettre en cause la crédibilité du scrutin. « Il estime que les jeux sont joués d’avance (…) et que le président de l’Autorité nationale des élections n’est plus crédible. Il l’a déjà récusé en demandant sa démission à 8h de l’ouverture des bureaux de vote »
À cela s’ajoutent, selon lui, les difficultés rencontrées par certains candidats pendant la campagne. « Si on ajoute les brimades enregistrées pendant la campagne, on voit que cela ne milite pas en faveur d’un processus électoral apaisé »

A lire aussi et écouter : Centrafrique : «Boycotter les élections, c’est condamner les Centrafricains à subir encore Touadéra» selon Anicet-Georges Dologuélé

Les enjeux sociaux relégués au second plan 

Faustin-Archange Touadéra, favori pour un troisième mandat rendu possible par la nouvelle Constitution, s’est présenté comme le « candidat de la stabilité ». Mais dans un pays où plus de 70% de la population vit sous le seuil de pauvreté, les enjeux sociaux auraient pu être centraux dans le débat électoral. Pourtant, selon Jean-Fernand Koena, ces questions n’ont pas été suffisamment débattues. « Nous sommes dans un pays où tout est prioritaire, que ce soient les enjeux économiques, sociaux et géostratégiques ». Il regrette une campagne pauvre en confrontations d’idées. « Les débats électoraux n’ont pas permis aux candidats d’aller vraiment dans la contradiction et la confrontation des idées pouvant permettre aux électeurs de voir la différence entre qui est capable de faire quoi »

Les fortes attentes des Centrafricains envers leurs dirigeants 

Au-delà des résultats, les attentes de la population restent immenses. Pour le journaliste, la question de la gouvernance est centrale. « Les Centrafricains attendent beaucoup de leurs nouvelles autorités, notamment la bonne gouvernance, puisque c’est la cause structurelle de tous les problèmes qui minent son développement ». Il estime que ce scrutin marque un moment décisif pour le pays. « Aujourd’hui, c’est le moment ou jamais pour les autorités de s’attaquer aux vrais problèmes : l’éducation, le développement, la lutte contre la corruption, la sécurité et la restructuration de l’État de droit »

Un tournant politique sous haute surveillance 

Alors que les résultats sont attendus dans les prochains jours, la présidentielle centrafricaine apparaît comme un test crucial pour la crédibilité démocratique du pays. Entre volonté de stabilité, contestations politiques et urgence sociale, l’issue du scrutin pourrait déterminer durablement la trajectoire de la République centrafricaine. 

 

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