Rwanda: un youtubeur affirme avoir été torturé en détention, selon HRW
Un youtubeur rwandais affirme avoir été torturé par les gardiens de sa prison, déclare lundi Human Rights Watch, exhortant les dirigeants du Commonwealth, qui se réunissent prochainement dans le pays, à faire pression sur le gouvernement pour plus de liberté d'expression.
13 juin 2022 à 17h36 par AFP
Aimable Karasira, 41 ans, ancien professeur d'université devenu youtubeur, a été arrêté il y a plus d'un an et est jugé pour négationnisme, accusation pour laquelle il encourt une peine de dix ans de prison. Selon Human Rights Watch (HRW), il a déclaré lors d'une audience au tribunal en mai que les autorités de la prison de Nyarugenge le soumettaient à des privations de sommeil, le battaient et lui refusaient des traitements pour ses problèmes de santé, notamment le diabète. "J'ai passé des jours sans dormir. Je ne sais pas comment expliquer la torture que j'ai subie", a-t-il déclaré au tribunal, selon un communiqué de HRW qui a obtenu les transcriptions des audiences. "Ils nous battent pour nous faire venir au tribunal (...) Ils nous torturent en mettant de la musique forte et en n'éteignant jamais les lumières. C'est une torture terrible, comme dans les films", a-t-il également affirmé. "Le personnel pénitentiaire nous dit qu'ils nous tueront après le CHOGM", a-t-il ajouté, faisant référence à la réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth (CHOGM) qui doit se tenir dans la capitale rwandaise Kigali la semaine du 20 juin. Vendredi, HRW et 22 autres ONG ont appelé les participants au CHOGM à faire pression sur les autorités rwandaises pour qu'elles s'engagent à libérer les critiques du pouvoir actuellement détenus et permettent une plus grande liberté d'expression. "A quelques kilomètres du Palais des congrès de Kigali, où les dirigeants du gouvernement du Commonwealth discuteront de bonne gouvernance, les journalistes et critiques rwandais emprisonnés sont brutalement réduits au silence", déclare lundi Lewis Mudge, directeur Afrique centrale à HRW. "Les victimes d'abus seront abandonnées par le Commonwealth s'il ne s'exprime pas sur la situation des droits de l'homme au Rwanda", ajoute-t-il. Selon HRW, "au moins 2 journalistes, 3 éditorialistes et 16 militants de l'opposition sont actuellement derrière les barreaux au Rwanda". Le Rwanda, dirigé par Paul Kagame depuis la fin du génocide de 1994 qui a fait 800.000 morts, selon l'ONU, principalement des Tutsi, est régulièrement accusé par des ONG de réprimer la liberté d'expression, les critiques et l'opposition politique. En novembre, le youtubeur Dieudonné Niyonsenga, dit Cyuma ("Fer" en langue kinyarwanda), a été condamné à sept ans de prison, notamment pour faux et usurpation d'identité. Quelques semaines plus tôt, une autre célèbre youtubeuse, Yvonne Idamange, avait été condamnée à 15 de prison pour incitation à la violence en ligne.