Scène inhabituelle à N’Djamena ce samedi 28 juin: une vingtaine de femmes ont manifesté en sous-vêtements devant le siège du parti d’opposition Les Transformateurs pour demander la libération de leur chef, Succès Masra. Certaines pleuraient, d’autres s’étaient agenouillées, implorant Dieu. "Libérez Masra, pourquoi vous le gardez ?", scandaient-elles. La scène, brève mais forte, a duré moins d’une heure avant de se disperser sans heurt. Une vidéo a été publiée sur la page Facebook officielle du parti.
Ces formes de mobilisation féminine, parfois spectaculaires, ne sont pas inédites au Tchad, notamment dans certaines régions non-musulmanes du sud du pays, d'où est originaire l’opposant incarcéré.
Succès Masra en grève de la faim depuis plusieurs jours
Succès Masra, figure de l’opposition, a été arrêté le 16 mai et fait depuis l’objet de lourdes accusations : incitation à la haine, constitution de bandes armées, complicité d’assassinat et profanation de sépultures. La justice tchadienne l’accuse notamment d’être impliqué dans les violences du 14 mai à Mandakao, dans le Logone-Occidental, où 42 personnes — majoritairement des femmes et des enfants — ont été tuées.
Le dirigeant des Transformateurs nie les faits qui lui sont reprochés. Son collectif d’avocats dénonce une "détention arbitraire". Selon Me Francis Kadjilembaye, coordinateur de la défense, le dossier repose sur des éléments contestables.
Depuis quatre jours, Masra a entamé une grève de la faim. "Il refuse de manger, de boire et de prendre ses médicaments", a alerté le secrétaire général du parti, Dr Tog-Yeum Ngorngar, qui tient les autorités pour responsables de la dégradation de son état de santé.
Une affaire qui réactive les tensions identitaires et politiques
Originaire du sud du pays et membre de l’ethnie Ngambaye, Succès Masra est particulièrement populaire dans cette région majoritairement chrétienne et animiste, qui se considère depuis longtemps marginalisée par le pouvoir central dominé par une élite issue du nord, à majorité musulmane.
Cette affaire ravive les fractures politiques, régionales et communautaires qui traversent le Tchad depuis des décennies. Alors que le pays sort à peine d’une transition politique sous haute tension, la détention de Masra, couplée à la réponse des autorités, pourrait alimenter de nouvelles tensions sur fond de défiance envers les institutions judiciaires et sécuritaires.
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