Descendant les trois marches qui séparent le public de la piste de danse, l’écharpe blanche déposée sur ses avant-bras, glisse jusqu’à ses hanches et se noue autour de son bassin. Nora ondule ses mains et pénètre au cœur du chapiteau du Cabaret Sauvage. Elle serpente entre les danseurs venus seuls, en couple, en famille ou entre amis, à cette soirée du samedi 20 septembre pour le spectacle des Dames du raï, co-réalisé et co-mise en scène par Méziane Azaïche.
“C’est un peu comme une transe”
Ses bottines à talons tapent le sol qui vibre au rythme des voix de Fella Japonia et de Cheikha Hadjla, accompagnées par leur orchestre composé de percussionnistes, flûtiste et claviériste.
La jeune femme a dansé toute la nuit, elle s’est sentie transportée par la musique, “c’est un peu comme une transe”, dit-elle avec un large sourire. Au-dessus d’elle et de cette foule, deux écrans géants font défiler les traductions des paroles des morceaux emblématiques du raï féminin, des biographies et de courtes vidéos retraçant la naissance de cette musique.
Les Dames du Raï reviennent au @CabaretSauvage du 5 au 28 sept. 🎪
— Cabaret Sauvage (@CabaretSauvage) June 5, 2025
12 dates pour célébrer les pionnières du #raï avec Cheikha Hadjla, Fella Japonia & leur orchestre.
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Infos & billetterie : https://t.co/7tBBH0cZBn pic.twitter.com/YCsHLUrtZV
Des femmes qui brisent les codes
Les allées du chapiteau se sont remplies d’une foule en fête. Même assis, le public chantait et dansait. Sourire aux lèvres, Karim vient pour la deuxième fois voir ses dames du raï. Au-delà de l’ambiance festive, ce sont les ponts culturels et linguistiques qui lui plaisent, car le raï, précise-t-il "ce n’est pas seulement Cheb Hasni ou Cheb Khaled". Les récits que développe le spectacle sont des morceaux d’histoire qui "permettent d’aller creuser plus loin".
Souvent abandonnées ou mariées de force, les fondatrices du raï comme Cheikha Rimitti, Cheikha Djenia, Cheikha Rabia ou Fadéla écrivaient des textes "un peu plus audacieux" que leurs homologues masculins, précise Rabah Mezouane, journaliste et auteur du spectacle. Ces voix mielleuses ou rocailleuses n’avaient pas accès aux scènes officielles de l’Algérie dans les années 1930. Elles se produisaient, le plus souvent visage voilé, devant un public restreint.
Un joyeux hommage
Seules les cérémonies religieuses, les "maisons closes, les bouges mal famés des villages et des villes" leur créaient une place, décrit l'auteur. Perçues d’un mauvais œil par les personnalités algériennes plus conservatrices, elles bousculaient les codes et "la morale bien-pensante" et "osaient dire tout haut ce que d’autres murmuraient tout bas".
Ce projet est une vraie fierté pour les deux chanteuses qui lui donnent vie. "On a modernisé le raï, mais on garde une base traditionnelle", raconte Fella Japonia avec beaucoup de plaisir. C'est une passerelle entre les époques qui se transcrit visuellement à travers les tenues, le décor, les chants actuels et "plus anciens avec le guellal et la gasba" (tambourin et flûte), ajoute sa partenaire.
À chaque représentation, une complicité se crée avec les spectateurs, et la scène devient un moment de partage autour des chagrins, de la joie, de la sensualité et des histoires d’amour.
Pratique. Le spectacle Les Dames du Raï est à voir jusqu'au dimanche 28 septembre au Cabaret Sauvage. Tarif : 25€. Billetterie en ligne en cliquant ici.
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