Gastronomie. Mory Sacko : "Quand j'ai ouvert mon restaurant, je voulais travailler, je voulais m'amuser"

Actus. Chef du restaurant étoilé MoSuke à Paris et de Mosugo, Mory Sacko s’est fait connaître pour sa cuisine qui mêle influences africaines, françaises et japonaises. Il fait partie d’une génération de chefs qui renouvellent la scène gastronomique française.

Gastronomie. Mory Sacko : "Quand j'ai ouvert mon restaurant, je voulais travailler, je voulais m'amuser"
Le chef étoilé Mory Sacko - Africa Radio

Avec du recul, est-ce que vous vous voyiez être là où vous en êtes aujourd’hui ?

Non, pas du tout (rires). Je ne me voyais pas être là aujourd’hui. Quand j’ai ouvert mon restaurant, je voulais travailler, je voulais m’amuser, je voulais avoir mon étoile, bien sûr, mais je ne pensais pas que ça allait prendre cette ampleur.

La deuxième étoile, vous y pensez ?

On fait plus qu'y penser, on y travaille. C’est une vraie ambition et on essaie de mettre les choses en place pour que ça puisse se faire.

Est-ce que la question de la représentation a été un sujet pour vous quand vous avez commencé dans la cuisine ? 

Oui, totalement. Ça a toujours été une question, et c’est vrai qu’à part Marcel, il n’y avait personne. Et c’est vrai que c’était très dur pour moi de trouver une histoire qui corresponde à ce que moi, j’avais envie de raconter.

Donc, je suis allé vers des chefs comme Thierry Marx, qui avait un vécu qui ressemblait au mien, mais sans avoir les mêmes origines. Et c’est plutôt comme ça que je suis allé chercher, on va dire, un peu de représentation, parce que lui aussi, c’est quelqu'un qui ne vient pas de beaux quartiers, qui n’a pas de cuisinier dans sa famille, qui s’est construit tout seul.

Vous êtes d’origine malienne et sénégalaise, et dans vos différentes interventions, vous racontez que vos parents avaient l’habitude, en particulier votre mère, de cuisiner les plats du Mali. Mais quand on regarde la cuisine, c’est à la fois de la créativité, c’est un respect des codes. Il y a aussi, parfois, un peu de chauvinisme. Comment s’affranchit-on de cela ?

Totalement, il y a beaucoup de chauvinisme que ce soit sur la cuisine française, que ce soit sur la cuisine japonaise. Comment se séparer de ça ? Par exemple, moi, quand je vais présenter mon mafé à ma mère, elle, elle est très tradi, elle m’a dit : « C’est bon, mais ce n’est pas un mafé. »

Je lui ai répondu : « Ok, c’est mon mafé alors ». Et ça ne se règle que par de la personnalité. Il faut assumer ses choix et se dire : « Ça ne ressemble pas à ce que ça doit ressembler peut-être, mais c’est ma version et moi, je l’aime bien. »

On voit aussi l’éclosion de la cuisine fusion. On voit des makis saveur mafé, par exemple, des arancinis au mafé, ce qui n’est pas au goût de tout le monde. Pour certains, il faut d’abord maîtriser les standards des plats du continent africain. Il faut qu’il y ait un cahier des charges. Quel regard portez-vous là-dessus ?

Pour le coup, c’est assez contradictoire, mais moi, justement, chez Mosuke, je refuse la notion de fusion parce que ce n’est pas ce qu’on fait. Justement, oui, on aurait pu faire un sushi au mafé,ça aurait été très drôle, mais ce n’est pas l’idée. L’idée, c’est vraiment d’aller plus profondément dans les trois cultures qu’on représente, de les respecter et de faire en sorte qu’on apporte une autre culture pour enrichir l’autre.

Ça se fait vraiment d’une manière beaucoup plus fondue, mais il n’y a jamais de logique démonstrative. Déjà, on ne fait pas quelque chose pour dire : « Vous voyez, il y a
l’Afrique, la France et le Japon dans tous les plats. »

Non. Il y a des plats qu'on va goûter et ça va être vraiment japonais. Et d'autres plats qu’on va goûter, on va se dire : « Un attieke poisson, c’est un attieke poisson. » On va peut-être travailler sur la technique, sur la forme, mais à la fin, il faut que ça ait le goût de l’attieke poisson.

C’est vraiment comme ça qu’on travaille. C’est vrai que cette cuisine fusion, si elle est bien faite, demande une certaine maîtrise et surtout de la connaissance sur le sujet qu’on traite.

Pour aller plus loin 

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À écouter : Vérane Frédiani, auteure du livre "L'Afrique cuisine en France"

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