Afrique du Sud: ultimatum pour les mineurs grévistes de Marikana

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MARIKANA (Afrique du Sud) (AFP) - (AFP)

Un ultimatum lancé par l'exploitant Lonmin menaçant de licencier les grévistes qui ne reprendraient pas le travail expire lundi, quatre jours après le massacre de la mine de Marikana, mais la majorité des mineurs ont d'ores et déjà rejeté l'ultimatum et entendent poursuivre le mouvement.

La direction de la mine de Lonmin à Marikana, qui a sommé les mineurs grévistes de reprendre le travail lundi matin, a annoncé qu'elle ne demanderait pas à ses employés non grévistes de reprendre leur poste si la police considère qu'ils sont en danger.

"On ne demandera à personne de reprendre le travail si la police considère qu'il y a un danger de représailles" de la part des grévistes, a affirmé Simon Scott, un haut responsable de Lonmin, cité dans le communiqué de la firme publié dans la nuit de dimanche à lundi.

Dans ce communiqué, "Lonmin a confirmé avoir demandé à ses 3.000 employés en grève illégale de reprendre le travail lundi 20 août, faute de quoi ils s'exposent à un possible licenciement".

"L'ultimatum ne s'applique qu'aux foreurs et assistants foreurs qui ont lancé une action illégale le 10 août", précise la firme.Les 25.000 employés et les 10.000 temporaires "qui ne sont pas en grève mais qui n'ont pas pu travailler à cause de la violence" pourront reprendre le travail sous protection de la police.

"Nous avons un long chemin à faire pour rétablir la confiance et essayer de retrouver la sérénité après ce qui est arrivé, mais ceux qui nous font confiance et veulent travailler méritent qu'on leur donne cette chance", a ajouté M. Scott.

Le président sud-africain Jacob Zuma a de son côté annoncé une semaine de deuil national en mémoire des 44 victimes de la mine de platine.

Dix personnes dont deux policiers ont été tuées entre les 10 et 12 août dans des affrontements intersyndicaux, et 34 mineurs ont été abattus et 78 blessés par la police jeudi.

Les mineurs interrogés par l'AFP dimanche ont réagi avec colère.

"Je ne retourne pas au boulot.Où est l'argent?", demande David Sikonyela, 52 ans, mineur du Lesotho, en prenant connaissance de l'ultimatum.

"Est-ce qu'ils vont virer aussi ceux qui sont à l'hôpital et à la morgue?", s'emporte son collègue Thapelo Modima, 46 ans."De toute façon, c'est mieux d'être mis à la porte parce qu'ici, on souffre.Nos vies ne vont pas changer.Lonmin se fiche de notre bien-être, jusqu'à maintenant ils ont refusé de nous parler, ils ont envoyé la police pour nous tuer".

"Des gens sont morts.On est en colère.Si on reprenait le travail, ce serait comme s'ils étaient morts pour rien", ajoute Fezile Magxaba, un contremaître de Marikana, en faisant sa lessive à un robinet collectif.

Les mineurs, qui touchent en moyenne 4.000 rands (400 euros) par mois, réclament 12.500 rands (1.250 euros), soit plus qu'un triplement de leur salaire.

Dans cette petite communauté proche de Rustenburg, dans le nord du pays, des services religieux discrets se sont tenus dans la journée: "Beaucoup de gens ont peur d'être vus en train de se rassembler, même pour venir à l'église.Nous faisons attention à ce que notre service ne puisse pas être considéré comme un rassemblement politique ou syndical", explique un prêtre de l'Eglise Pentecôtiste, sous couvert de l'anonymat.

Non loin de là, à l'hôpital de la mine, des familles encore dans l'ignorance du sort d'un proche continuaient à venir s'informer.

"La nation est sous le choc et dans la peine", a déclaré le président en annonçant le deuil national.

"Cette semaine (...) nous devons nous unir contre la violence, quelle qu'elle soit.Nous devons réaffirmer notre foi en la paix, la stabilité et l'ordre, et dans la construction d'une société solidaire débarrassée du crime et de la violence".

La présidence a également précisé que le jeudi 23 août serait le jour officiel pour les cérémonies commémoratives organisées dans le pays.

Dans le même communiqué, M. Zuma a par ailleurs annoncé la composition de la commission inter-ministérielle chargée d'enquêter sur la tragédie.

Un comité dirigé par les ministres des Ressources naturelles et de la Police doit se rendre lundi à la mine pour organiser le soutien logistique aux familles des victimes."Il sera chargé de coordonner toutes les aides aux familles et aux proches, y compris l'identification des membres des familles (des victimes), le soutien psychologique et les funérailles", selon un communiqué de la présidence.

Avant l'annonce du deuil national, les commentaires politiques allaient bon train, accusant notamment le chef de l'Etat d'avoir été passif tout au long de la crise.

La vedette des journaux du dimanche était le jeune tribun populiste Julius Malema, soudain sorti de l'anonymat politique dans lequel il était tombé après avoir été exclu en avril de l'ANC, le parti au pouvoir, pour ses provocations répétées.

Samedi, l'ancien leader de la ligue de jeunesse de l'ANC s'est rendu auprès des mineurs et s'est adressé à eux, refusant toute forme de protection policière.Il a accusé le président Zuma d'être responsable du massacre et l'a appelé à démissionner.

"Zuma ne s'intéresse pas aux mineurs.Il est venu ici hier soir (vendredi) et il a rencontré des blancs.Il ne sait même pas si les mineurs sont sains et saufs ou pas", a-t-il lancé aux grévistes.

Malema, qui n'a plus aucune structure politique autour de lui, a très longtemps incarné l'aile radicale de l'ANC.Insatisfait de voir le chômage, la misère et les inégalités s'aggraver 18 ans après la chute de l'apartheid, il appelait notamment à la nationalisation des mines et à l'expulsion sans compensation des grands propriétaires terriens blancs.

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