Angola : “La crise économique, sociale et politique est très profonde” selon le politologue Didier Péclard

Actus. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU a réclamé jeudi 31 juillet une enquête sur la répression en Angola des manifestations contre une augmentation des prix du carburant, qui a fait 22 morts cette semaine. Analyse de Didier Péclard, professeur de sciences politiques et études africaines à l’université de Genève.

Angola : “La crise économique, sociale et politique est très profonde” selon le politologue Didier Péclard
Le président angolais Joao Lourenço - Wikimedia commons


Ecoutez Didier Péclard

La décision du gouvernement angolais début juillet d'augmenter les prix des carburants fortement subventionnés de 300 à 400 kwanzas par litre (de 0,28 à 0,38 euro) a provoqué un vif mécontentement dans ce pays d'Afrique australe, deuxième producteur africain de pétrole après le Nigeria, mais où de nombreuses personnes vivent dans la pauvreté. Il s'agit des pires violences enregistrées dans le pays depuis plusieurs années, selon les autorités “Le nombre de victimes est impréssionnant, c’est inédit en Angola pour ce genre de manifestations. La hausse des prix des carburants a vraiment été l’élément déclencheur, qui est révélateur d’une crise sociale, économique et politique très profonde” déclare Didier Péclard, professeur de sciences politiques et études africaines à l’université de Genève. 

A lire : Angola : 22 morts dans des manifestations violentes contre la hausse du carburant

 

“C’est très rare qu’il y ait une réflexion au niveau du gouvernement sur les raisons profondes de cette crise” selon Didier Péclard 

Dans ce pays lusophone d'une trentaine de millions d'habitants, l'inflation est très élevée et a approché les 20% en juin, tandis que le taux de chômage a atteint presque 30%, selon l'autorité nationale des statistiques “Pour l’instant, le président Joao Lourenço ne s’est pas exprimé. Il est en voyage à l’étranger. Généralement dans ce genre de situation, on va condamner les responsables des pillages, c’est très rare qu’il y ait une réflexion au niveau du gouvernement sur les raisons profondes de cette crise. Les taux de chômage chez les jeunes sont très élevés, notamment en ville. Il y a eu aussi depuis de très nombreuses années un manque cruel d’investissements pour soutenir l’agriculture familiale qui fait vivre, en fait, une grande partie des Angolais dans les zones rurales. Il y a un sous-investissement massif dans le secteur de la santé, de l’éducation, donc c’est vraiment une crise sociale assez généralisée qui s’exprime par ces émeutes” ajoute Didier Péclard.

Les troubles de lundi et mardi se sont étendus à l'intérieur du pays. Un journaliste de la ville de Huambo, située à environ 600 kilomètres de la capitale Luanda, y a rapporté des pillages et des émeutes. Des manifestations et des violences ont également été signalées, selon des images sur les réseaux sociaux, dans la ville côtière de Benguela, à environ 600 kilomètres au sud de Luanda, où la police a été déployée. 

L’ONU réagit  

"Les autorités en Angola doivent mener des enquêtes rapides, approfondies et indépendantes sur la mort d'au moins 22 personnes, ainsi que sur les violations des droits humains associées" lors de ces manifestations, souligne le Haut-Commissariat dans un communiqué. Si l'ONU reconnaît que des manifestants ont commis des violences et que des individus ont profité des manifestations pour se livrer à des pillages, elle laisse entendre que les forces de l'ordre ont fait un usage disproportionné de la force. 
 

 

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