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A Bria, dans l'est de la Centrafrique, "on ne peut pas savoir qui est ami et qui est ennemi", dit un officier du plus grand groupe armé du pays, après les combats meurtriers qui ont opposé ce week-end des miliciens de différentes ethnies, y compris dans ses propres rangs.

Cette nouvelle flamb&eacute;e de violences, qui a oppos&eacute; des miliciens membres de l'ethnie rounga &agrave; ceux des ethnies kara et goula, a fait des dizaines de morts dans cette ville diamantif&egrave;re au c&oelig;ur des convoitises et des conflits d'un pays ravag&eacute; par trois guerres civiles en vingt ans.
Bria n'avait plus connu de tels affrontements depuis la signature d'un accord de paix entre le gouvernement centrafricain et 14 groupes arm&eacute;s le 6 f&eacute;vrier.
Mais cette fois, une partie des combattants des deux bords sont issus des m&ecirc;mes rangs : ceux du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC).Le plus grand groupe arm&eacute; du pays rassemblait &agrave; sa cr&eacute;ation en 2014 plusieurs ethnies originaires du Nord-Est, qui s'affrontent d&eacute;sormais.&nbsp;
A Bria, les officiers du FPRC eux-m&ecirc;mes peinent &agrave; s'y retrouver: "On a retir&eacute; tous nos &eacute;l&eacute;ments du quartier, parce qu'on ne peut pas savoir qui est ami et qui est ennemi", assure le g&eacute;n&eacute;ral Dambousha, un fid&egrave;le d'Abdoulaye Hiss&egrave;ne, le chef militaire rounga du FPRC.&nbsp;
En temps de paix, d&eacute;j&agrave;, Bria est un imbroglio politico-&eacute;conomique difficile &agrave; d&eacute;crypter : cinq groupes arm&eacute;s y cohabitent, chacun r&eacute;gnant sur un quartier selon leur communaut&eacute; d'appartenance.&nbsp;
Cinq micro-Etats o&ugrave; les miliciens pr&eacute;l&egrave;vent des taxes et administrent la justice du quotidien sans vraiment se soucier des autorit&eacute;s officielles, incarn&eacute;es par un maire, un pr&eacute;fet et quelques militaires sans moyens.&nbsp;
Riche en diamants et plac&eacute;e au carrefour des &eacute;changes avec les deux Soudan et le centre du pays, Bria repr&eacute;sente une manne indispensable pour les mouvement rebelles.&nbsp;
Depuis toujours, les alliances s'y nouent et s'y d&eacute;nouent, au gr&eacute; des int&eacute;r&ecirc;ts &eacute;conomiques et politiques toujours mouvants dans ce Nord-Est d&eacute;laiss&eacute; par le pouvoir de Bangui et particuli&egrave;rement instable.&nbsp;
En 2018, la signature d'un accord entre plusieurs groupes arm&eacute;s pr&eacute;sents dans la r&eacute;gion avait permis d'&eacute;tablir un &eacute;quilibre pr&eacute;caire.&nbsp;

- D&eacute;litement au sein du FPRC -

Mais le FPRC est "aujourd'hui confront&eacute; &agrave; un d&eacute;fi existentiel, car une partie du leadership n'appartient pas &agrave; la m&ecirc;me ethnie que ses combattants", explique Hans de Marie Heungoup, chercheur &agrave; l'International Crisis Group (ICG).
Le chef militaire du FPRC, Abdoulaye Hiss&egrave;ne, et plusieurs de ses officiers sont des Rounga.Cette ethnie s'est progressivement impos&eacute;e dans la taxation des marchandises &agrave; la fronti&egrave;re du Soudan, par laquelle transitent notamment les armes, pr&eacute;cieuses pour les groupes rebelles.&nbsp;
Une mainmise gu&egrave;re appr&eacute;ci&eacute;e des Kara, originaires de la pr&eacute;fecture voisine de la Vakaga, plus au nord.L&agrave;-bas, depuis juillet, de violents combats opposent le FPRC et le Mouvement des lib&eacute;rateurs centrafricains pour la justice (MLCJ), un groupe arm&eacute; affili&eacute; &agrave; l'ethnie kara, qui se disputent le contr&ocirc;le de la ville de Birao et de la route du Soudan.&nbsp;
"Bria est une r&eacute;percussion des &eacute;v&egrave;nements de Birao", souligne Hans de Marie.En juillet, les Kara de la Vakaga ont sign&eacute; une alliance avec les Goula.
Cette ethnie majoritaire &agrave; Bria a toujours occup&eacute; une place importante dans les r&eacute;bellions successives contre le pouvoir de Bangui.&nbsp;
Or, certains des chefs goulas s'estiment d&eacute;sormais flou&eacute;s par le leadership rounga du FPRC.Autrefois unis dans la r&eacute;bellion contre le pouvoir de Bangui, Goula et Rounga sont d&eacute;sormais &agrave; couteaux tir&eacute;s.&nbsp;

- Des diamants convoit&eacute;s -

Illustration de ce renversement : Azor Khalit.Ancien du FPRC, ce militaire est l'un des leaders goula les plus influents de Bria.&nbsp;
"Ce qui faisait la force du FPRC, c'&eacute;taient les Kara et les Goula", assure celui qui se pr&eacute;sente d&eacute;sormais comme le porte-parole du Parti pour le Rassemblement de la nation centrafricaine (PRNC).Un groupe arm&eacute; form&eacute; en mai qui n'a jamais sign&eacute; l'accord de paix du 6 f&eacute;vrier avec le gouvernement centrafricain.&nbsp;
Les Rounga "ne nous aiment pas, et pourtant, nous leur avons donn&eacute; notre terre", affirme-t-il.
Goula et Rounga vivaient c&ocirc;te-&agrave;-c&ocirc;te depuis des d&eacute;cennies.Mais &agrave; Bria comme dans le reste du pays, les tensions ethniques sont r&eacute;guli&egrave;rement instrumentalis&eacute;es pour servir les int&eacute;r&ecirc;ts politiques et &eacute;conomiques de chefs de guerre, comme l'a soulign&eacute; un rapport de l'ONG The Sentry en 2018.&nbsp;
"Les Goula contr&ocirc;lent beaucoup de mines autour de Bria", explique un diamantaire centrafricain travaillant dans la r&eacute;gion.Mais "en ville, la plupart des bureaux de vente de diamants appartiennent &agrave; des Rounga.Ce sont des commer&ccedil;ants qui ont &eacute;tabli des r&eacute;seaux solides avec des acheteurs &eacute;trangers, notamment indiens et libanais.C'est l'une des principales raisons qui ont conduit &agrave; ces tensions", assure-t-il.
Des tensions qui menacent de d&eacute;g&eacute;n&eacute;rer &agrave; nouveau : les humanitaires pr&eacute;sents &agrave; Bria craignent une reprise des combats dans les prochains jours.&nbsp;
Si les Rounga "attaquent, on va se d&eacute;fendre en cons&eacute;quence", menace Azor Khalit."On ne n&eacute;gocie pas avec ces gens.On les neutralise.On les d&eacute;truit".

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