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"Bonjour, ce message concerne le coronavirus.C'est une maladie très dangereuse...": la mise en garde à la population est diffusée via une quinzaine de hauts-parleurs éparpillés dans le village d'Azaguie-Ahoua, à 50 km au nord d'Abidjan, sur ordre....de son roi.

"Cela remplace les crieurs dans la rue", explique le griot Gustave Aguie Ahouasso, qui officie derri&egrave;re le microphone.&nbsp;
Ces baffles install&eacute;es de mani&egrave;re permanente ne sont pas destin&eacute;es &agrave; diffuser des &eacute;missions radio ou des publicit&eacute;s mais sont le moyen de communication choisi par le roi et chef du village d'Azaguie, Nanan Ako Ako Omer, pour faire passer des messages aux habitants.
Ainsi, le roi fait diffuser toute information qu'il juge importante aux 10.000 &acirc;mes de son village via des hauts-parleurs, utilisant un proc&eacute;d&eacute; mis en place dans de nombreuses autres communes ivoiriennes.
"Ici, &agrave; Azagui&eacute;, les chefs ont un moyen super avec les haut-parleurs.Ca &eacute;vite les contacts (d'un rassemblement).On parle en langue (locale ab&eacute;) et en fran&ccedil;ais.Le message passe.On suit les instructions", explique Genevi&egrave;ve Akoua Kouassi, une institutrice tout en faisant son march&eacute;.&nbsp;
La communication royale vise surtout ces derniers jours &agrave; sensibiliser les habitants au danger du coronavirus.&nbsp;
La C&ocirc;te d'Ivoire comptait samedi une centaine de cas coronavirus pour aucun d&eacute;c&egrave;s.L'&eacute;tat d'urgence a &eacute;t&eacute; d&eacute;clar&eacute; et un couvre-feu est en vigueur dans tout le pays.
"Respectons les distances, un m&egrave;tre entre les gens (...) Arr&ecirc;tons de manger de la viande de brousse", lance le griot en langue locale ab&eacute; puis en fran&ccedil;ais.&nbsp;
"On &eacute;coute les messages des haut parleurs.Aujourd'hui, on nous a r&eacute;p&eacute;t&eacute; que tout le monde doit &ecirc;tre &agrave; la maison &agrave; partir de 19H00-20H00", explique Francia Nad&egrave;ge Apo, coiffeuse.&nbsp;
Dans sa "boutique" compos&eacute;e en tout et pour tout de deux tabourets donnant directement sur la rue juste &nbsp;sous les baffles, elle confie avoir "peur" m&ecirc;me si "les haut-parleurs nous aident".&nbsp;
Le pays compte des centaines de rois et chefs traditionnels dans une organisation datant d'avant l'&egrave;re coloniale.&nbsp;Ce maillage traditionnel de tout le territoire fonctionne parall&egrave;lement &agrave; l'organisation politique du pays.
Le poids de ces rois et chefs est important dans de nombreuses d&eacute;cisions locales mais parfois aussi nationales.&nbsp;
En 2016, la nouvelle Constitution a cr&eacute;&eacute; la Chambre Nationale des Rois et Chefs Traditionnels pour leur donner une reconnaissance officielle et un r&ocirc;le consultatif.&nbsp;
- Jeunes en col&egrave;re -

A 600 km plus au nord d'Azaguie, &agrave; Gbini, tout pr&egrave;s de la fronti&egrave;re malienne, le chef du village Aly Djodjogo Traor&eacute;, v&ecirc;tu d'un&nbsp;boubou vert clair, s'adresse &nbsp;aux chefs de communaut&eacute;s dans une classe de l'&eacute;cole de ce village pauvre, qui compte plus de 3.000 habitants vivant sans &eacute;lectricit&eacute;.
Ici, pas de haut-parleurs mais des r&eacute;unions malgr&eacute; le coronavirus.&nbsp;
"Je vous demande de vous laver les mains avec du savon ou&nbsp;le&nbsp;gel qui est un produit&nbsp;qu&rsquo;on vend dans les pharmacies", explique-t-il patiemment en senoufo (langue locale) puis en malink&eacute; pour les Maliens du village.
"Allez dire qu'il faut &eacute;viter les attroupements.Il faut fermer les maquis, bars&nbsp;o&ugrave; sont souvent les prostitu&eacute;es.Les pri&egrave;res dans les mosqu&eacute;es et &eacute;glises sont suspendues.Il faut prier &agrave; la maison", poursuit-il.&nbsp;
Mais le plus dur est &agrave; venir pour les habitants qui vivent majoritairement de l'orpaillage.&nbsp;
"A partir&nbsp;d'aujourd&rsquo;hui&nbsp;on arr&ecirc;te le travail de &uml;+dabada+ (orpaillage)", dit-il.&nbsp;
Des jeunes protestent, arguant qu'ils ne peuvent pas vivre sans cet argent &nbsp;mais le chef reste ferme: "Ceux qui ne respecteront pas cette d&eacute;cision devront quitter le village".
- "On a besoin d'aide" -&nbsp;
Dans le village d'Azaguie, le m&eacute;contentement gronde aussi.Mais, ce sont le roi et sa cour qui sont en col&egrave;re.
"On travaille &agrave; sensibiliser pour &eacute;viter que le virus arrive ici.Mais, on a besoin d'aide.Les choses les plus simples sont compliqu&eacute;es.On dit +lavez-vous les mains+.On n'a pas de gel mais on n'a pas d'eau (courante) non plus.Comment se lave-t-on les mains sans eau?En se crachant dans les mains?", s'insurge le roi Nanan Ako Ako Omer, v&ecirc;tu d'un toge blanche et bleue.
Un des "notables" qui assiste le roi, Maurice Boua Akoucha, a aussi des craintes.&nbsp;
"On parle de confinement , de rester chez soi.Mais, il n'y a pas de mesures d'accompagnement.Ce qui va tuer plus que le virus, c'est la faim.Si ca perdure on mange quoi?On sera oblig&eacute;s de sortir", dit-il.
Un autre notable de la cour souligne la densit&eacute; de population dans les maisons et les cours.&nbsp;
"L'Afrique, ce n'est pas l'Europe ou la Chine qui ont des moyens.Malgr&eacute; cela, il y a eu beaucoup de morts, souligne Boua Akoucha."Le prix ici sera catastophique".

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