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RDC: une ONG accuse un programme de contrôle de blanchir des minerais de conflit

L'ONG Global Witness accuse un programme censé contrôler l'origine responsable de métaux extraits de République démocratique du Congo de contribuer au contraire au blanchiment de minerais liés à des conflits, au travail des enfants, ou issus de trafic et de contrebande.

AFRICA RADIO

27 avril 2022 à 1h06 par AFP

Pour s'approvisionner en étain, tantale et tungstène (les métaux dits "3T", très utilisés dans les équipements électroniques), de grandes entreprises comme Apple, Intel, Samsung, Nokia, Motorola, Tesla, s'appuient sur ce mécanisme "défaillant", déplore l'ONG britannique dans un rapport publié mercredi. Ce programme, appelé ITSCI (Initiative de la chaîne d'approvisionnement de l'étain), est un des principaux mécanismes mis en place il y a plus de 10 ans pour assurer un approvisionnement en minerais "libres de conflit" et extraits de façon responsable, précise Golbal Witness. L'ONG rappelle que "l'armée congolaise et les groupes armés rivaux qui se disputent le pouvoir dans certaines régions de l'Est de la RDC voient depuis des décennies (...) le commerce des minerais comme une source vitale de revenus". Mais Global Witness pointe un "conflit d'intérêts" susceptible d'entraver la capacité de l'ITSCI à assumer son rôle. Ce mécanisme, écrit l'ONG, est "géré par deux influentes associations du secteur de l'étain et du tantale" qui représentent de nombreux "grands acheteurs de minerais 3T". Certaines sources "vont jusqu'à suggérer que le blanchiment de minerais de contrebande serait la raison d'être du programme ITSCI", affirme l'ONG. Global Witness précise avoir mené une enquête dans les provinces congolaises du Sud-Kivu et du Nord-Kivu ainsi qu'au Rwanda et assure que ce programme a "très manifestement échoué". Cette enquête a notamment révélé que "dans une certaine zone minière" de l'est de la RDC, "90% des minerais ayant intégré le programme au cours du premier trimestre 2021 ne provenaient pas de mines validées". "Avec ses effectifs limités et l'insuffisance de ses contrôles, ITSCI ne dissuade pas le blanchiment de minerais par les exploitants et les négociants", affirme le rapport. Et "dans certains cas, des agents de terrain d'ITSCI auraient accepté des pots-de-vin pour fermer les yeux". Selon l'ONG, "l'ampleur du phénomène d'étiquetage frauduleux de minerais (...) suggère qu'ITSCI, les agents de l'État sur le terrain et leurs supérieurs hiérarchiques connaissent pertinemment le problème". Elle estime que les entreprises internationales elles aussi "doivent avoir connaissance de ces défaillances depuis longtemps" et s'en accomodent. Global Witness précise qu'interrogée, l'ITSCI "a nié toute contamination avec des minerais contribuant à des conflits armés et au travail des enfants" et "contesté tout conflit d'intérêts". Les sociétés internationales ont de leur côté "réaffirmé leur engagement à s'approvisionner auprès de sources responsables".