Relations commerciales entre le continent africain et la Chine : "On observe une diversification de la nature des échanges commerciaux"

Actus. Le Japon va accroître ses investissements en Afrique en coopération avec l’Inde et les pays du Moyen-Orient. Le Qatar a également annoncé une multiplication de ses investissements sur le continent africain. Qu’en est-il de la Chine ? Comment évolue la coopération avec les pays africains ? Xavier Aurégan, chercheur spécialiste des relations sino-africaines et auteur de « Chine, puissance africaine », était l’invité d’Africa Radio ce mardi 2 septembre.

Relations commerciales entre le continent africain et la Chine : "On observe une diversification de la nature des échanges commerciaux"
Le président Xi Jinping - Flikr

Comment se portent les relations entre les pays africains et la Chine ?

Sur le plan commercial, les relations stagnent d’une certaine manière. Elles ont connu une décroissance pendant la pandémie de COVID-19, à l’image de l’ensemble des relations économiques et financières entre la Chine et l’Afrique. Puis, elles ont augmenté de nouveau, comme les échanges internationaux en général, après la pandémie. Nous sommes donc aujourd’hui dans une forme de stagnation : ni baisse spectaculaire, ni hausse marquée. On observe en revanche une diversification de la nature des échanges commerciaux, avec une part croissante de produits transformés, ce qui correspond, en quelque sorte, à une montée en gamme de la relation commerciale sino-africaine.

La Chine est aujourd’hui le premier financeur d’infrastructures en Afrique. Les principaux secteurs concernés sont les transports, l’énergie, l’eau ainsi que les technologies de l’information et de la communication. Elle cherche également à développer sa présence militaire sur le continent. Pourquoi la Chine souhaite-t-elle investir aussi ce terrain en Afrique ?

La Chine populaire a toujours entretenu des relations diplomatiques et militaires avec certains pays africains, et ce, parfois même avant l’indépendance de certains États.

Ces dernières années, on observe une capacité croissante de la Chine à exporter du matériel militaire de qualité relative, selon les besoins exprimés par les États africains, c’est-à-dire les clients.

On assiste ainsi à une diversification des produits exportés par la Chine, le matériel militaire en faisant partie. Certains gouvernements ou régimes africains, y compris militaires, se trouvent dans la nécessité d’importer ce type d’équipements.

Or, ce matériel n’est pas toujours fourni par les États occidentaux, ni même par la Russie actuellement, qui a d’autres priorités. Dès lors, plusieurs États africains se tournent vers la Chine, où l’on constate également, comme dans d’autres domaines, une montée en gamme de l’offre de vente de matériel militaire.

La Chine a toujours mis en avant l’idée d’un partenariat « gagnant-gagnant ». Toutefois, de nombreux chercheurs soulignent que cette relation est en réalité asymétrique. Est-elle toujours autant aujourd’hui ? Je rappelle que, si la Chine est bien le premier partenaire commercial de l’Afrique, les échanges Afrique–Chine ne représentent qu’environ 4 % du commerce total africain.

Depuis les années 1990, les échanges commerciaux sont globalement favorables à la Chine. Cela était relativement moins marqué durant les années 2000. Mais à partir de la fin du boom des matières premières, autour de 2013-2014, les courbes se sont croisées : la balance commerciale a commencé à profiter davantage à la Chine. C’est d’ailleurs l’une des grandes critiques formulées par la partie africaine.

Les 53 États africains qui reconnaissent Pékin soulignent qu’une telle asymétrie commerciale leur fait perdre plus qu’elle ne leur fait gagner. Ils cherchent donc, dans leur discours du moins, à rétablir une balance commerciale plus égalitaire entre les deux parties.

La semaine dernière, on a vu que le Japon et le Qatar cherchent, eux aussi, à renforcer leur présence sur le continent africain. Le Japon, par exemple, prévoit d’accroître ses investissements en coopération avec l’Inde et les pays du Moyen-Orient. N’assiste-t-on pas à une guerre d’influence entre les pays asiatiques en Afrique ? Et, dans ce contexte, les pays africains peuvent-ils tirer profit de cet intérêt croissant que leur portent les puissances asiatiques ?

Cette concurrence est connue depuis plusieurs décennies. L’arrivée, ou plutôt le retour progressif, de la Chine populaire en Afrique, à partir du milieu des années 1990 et surtout durant la décennie 2000, a renforcé la capacité des États africains à négocier et à mettre leurs partenaires étrangers en concurrence. C’est évidemment un avantage pour eux : depuis 20 à 30 ans, ils peuvent non seulement jouer sur le plan commercial, mais aussi sur le plan financier. Comme rappelé, la Chine est aujourd’hui le premier bailleur de fonds en infrastructures sur le continent. Cela représente un bénéfice certain pour les pays africains, qui peuvent ainsi combiner différentes offres et créer des consortiums d’entreprises, qu’elles soient publiques ou privées.

À l’échelle asiatique, la concurrence n’est pas nouvelle. On observe une rivalité sino-indienne, notamment dans la partie orientale de l’Afrique.

Par ailleurs, la Turquie, depuis une dizaine d’années, a renouvelé son partenariat stratégique avec le continent, initialement avec des pays du Sahel et d’Afrique de l’Ouest, puis progressivement en Afrique centrale et orientale.

Cette mise en concurrence des partenaires étrangers constitue donc une opportunité. Il appartient désormais aux États africains d’en tirer pleinement parti.

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