Riek Machar, a été inculpé jeudi dernier pour terrorisme et trahison. Il est présumé coupable d’avoir coordonné avec sept coaccusés une attaque contre une base militaire dans le nord du pays au début du mois de mars. Riek Machar est aussi un opposant et l’éternel rival du chef de l’État Salva Kiir. Il était en résidence surveillée depuis six mois. Les partisans de Riek Machar ont appelé à la mobilisation militaire contre le gouvernement de Salva Kiir. Est-ce que ces événements peuvent refaire basculer le Soudan du Sud vers une guerre civile ?
Effectivement, le pays est en train de connaître une nouvelle crise politique qui fait craindre, à beaucoup de responsables de différents partis, un retour à la guerre, un retour à la guerre civile. Moi, je pense qu’il ne faut pas minimiser ce qui s’est déjà passé ces six derniers mois, c’est-à-dire qu’il y a eu une escalade politique et militaire depuis, on va dire, le début de l’année 2025, qui a d’ores et déjà replongé certains États dans une situation de conflits armés.
Elle n’est pas dite, elle n’est pas affichée, cette forme de guerre un peu sous-jacente, mais elle est vraiment réelle et bien présente, notamment pour les civils qui se retrouvent entre deux feux, comme c’était déjà le cas à certains moments de la guerre civile passée.
Finalement, on peut dire que l’histoire se répète… ou bien qu’il y a de nouveaux paramètres qui sont entrés en jeu dans le conflit, qui oppose depuis toujours Salva Kiir et Riek Machar ?
Ce conflit, dont vous venez de parler, a démarré en décembre 2013. C’était un conflit éminemment politique, né au sein même du pouvoir, c’est-à-dire du parti au pouvoir, le SPLM.
À ce moment-là, les différentes élites et tenants du parti n’arrivaient pas à se mettre d’accord sur une ligne de route, notamment sur les candidats qui allaient pouvoir, ou non, se présenter à l’élection présidentielle, alors prévue en 2015. Il y avait de fortes mésententes et divisions politiques entre les membres historiques de ce parti, qui était d’abord un mouvement de libération, puis qui a pris le pouvoir à la suite des accords avec le Soudan, et qui, une fois le pays devenu indépendant, est devenu le parti au gouvernement.
Ces divisions étaient éminemment politiques. Il n’y avait pas, au départ, de facteur ethnique ou identitaire. C’est par la suite que différents leaders — au moment où le cercle autour de Salva Kiir s’est opposé à Riek Machar — ont affirmé que ce dernier avait tenté, avec ses alliés, de mener un coup d’État en 2013. Ils ont alors envoyé une partie de leurs forces armées dans la capitale et mené des attaques contre la population nuer.
C’est là qu’est né l’amalgame : cela a été perçu comme une guerre contre les Nuers. Ces derniers, voyant que les Dinkas, l’ethnie du président, s’appuyaient sur des milices recrutées sur une base ethnique autour de lui, ont commencé à associer un camp politique à un groupe ethnique. C’est ainsi qu’un antagonisme identitaire s’est cristallisé.
Mais à la base, les divisions étaient, et restent, éminemment politiques.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.