Kenya: les douloureux souvenirs électoraux d'une star des stades

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NAIROBI (AFP) - (AFP)

Pour le Kényan Luke Kibet, champion du monde 2007 de marathon, le souvenir du dernier scrutin présidentiel de son pays reste cinq ans après douloureux: dans les violences post-électorales, il allait échapper de peu à la mort.Et il vit l'approche du retour aux urnes avec appréhension.

Fin 2007, le président Mwai Kibaki est déclaré réélu.Immédiatement, sa victoire est cependant contestée.Commencent alors de terribles violences ethniques, qui, en un mois, vont faire plus de 1.100 morts.Parmi eux, deux collègues de Kibet, athlètes de renommée internationale.

 le titre de champion du monde de marathon.C'était à Osaka, au Japon, en juillet 2007.Les violences post-électorales allaient interrompre ses ambitions sportives.

Le marathonien, comme de nombreuses victimes des violences post-électorales, aborde aujourd'hui avec appréhension la nouvelle élection présidentielle qui se profile -- le premier tour est prévu pour le 4 mars.

"Cela a été un terrible spectacle, qui ne doit jamais se répéter," glisse Kibet, en se remémorant ces femmes et enfants à qui il avait offert refuge chez lui, pendant une semaine, pour leur éviter d'être massacrés.

Le marathonien se souvient avoir lui-même "tout juste échappé à la mort".A la tête, il garde une trace indélébile des affrontements: une cicatrice.Une pierre jetée par des manifestants lui avait fendu la boîte crânienne.

Kibet avait alors 24 ans, et venait tout juste de décrocher Fin 2007 et début 2008, la ville natale de l'athlète, Eldoret, berceau de l'athlétisme kényan, fut le théâtre d'affrontements parmi les plus meurtriers entre Kikuyu, qui soutenaient la réélection controversée de Kibaki, et Kalenjin, ralliés derrière Raila Odinga, lui-même issu de l'ethnie Luo, devenu depuis Premier ministre et aujourd'hui de nouveau candidat à la présidentielle.

Les violences de l'époque avaient, en plus des nombreux morts, fait des centaines de milliers de déplacés: les attaques prenaient souvent la forme de raids, dans lesquels des membres d'une ethnie venaient chasser de chez eux ceux d'une autre, rivale, armés de gourdins, lances, flèches ou armes à feu.

Un lent retour à la compétition

Kibet, qui était alors aussi gardien de prison, semble aujourd'hui encore traumatisé par ce qui lui est alors arrivé: sa voiture avait été prise en otage par des jeunes armés, il avait dû tirer en l'air pour éloigner les agresseurs.

Quatre autres athlètes kényans se trouvaient dans son véhicule.Tous avaient reçu l'ordre de leur fédération de quitter Eldoret, une ville en altitude particulièrement propice à l'entraînement, et de se mettre à l'abri à Nairobi.

"Je suis sorti de la voiture pour leur (aux agresseurs) expliquer que nous n'étions que des athlètes, mais ils n'en démordaient pas," se souvient-il.Son pistolet les a sauvés.Mais, ailleurs, d'autres athlètes, et des centaines de Kényans, n'ont parfois pas eu autant de chance.

Lucas Sang, un membre du relais kényan 4X400 m aux jeux Olympiques de Séoul de 1988, allait être battu à mort dans la même ville d'Eldoret.Le marathonien Wesley Ngetich allait être tué par une flèche empoisonnée dans la célèbre réserve animalière du Masaï Mara.

"En regardant derrière moi, j'éprouve de la tristesse: nous avons laissé notre pays allonger les statistiques de violences ethniques en Afrique," dit-il.

Kibet s'était d'abord promis de ne plus voter, mais il a changé d'avis.Et a aussi fini par reprendre le chemin d'un entraînement sérieux l'an dernier.

En décembre 2012, il a terminé deuxième du marathon de Singapour, une course qu'il a remportée deux fois dans le passé et sur laquelle il reste, aujourd'hui encore, détenteur du meilleur temps: 2:11:25.

Sa carrière sportive a malgré tout pris un sérieux coup: en plus de sa blessure à la tête, le marathonien souffre aujourd'hui une blessure au tendon d'Achille.

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