Neuf personnes ont été blessées à Nairobi lors d'affrontements entre des manifestants dénonçant les violences policières, les forces de l'ordre et des centaines de "voyous" à moto armés, de fouets et de bâtons qui s'en sont pris aux protestataires, mardi 17 juin.
Des journalistes de l'AFP ont vu un policier en tenue anti-émeute tirer à bout portant vers la tête d'un civil. Alors que beaucoup pensaient que l'homme avait été tué, deux sources médicales ont indiqué à l'AFP qu'il était toujours vivant, mais dans un état critique. L'incident, qui a été filmé, a rapidement suscité l'indignation en ligne.
"Encore un Kényan, visé à bout portant à la tête par les flics tueurs de (William) Ruto", le président kényan, a réagi un internaute sur X. "M. Ruto. En plein jour, votre équipe de tueurs a tué hors de toute procédure judiciaire un innocent, non armé et non violent, qui vendait des masques", a également dénoncé sur X Kalonzo Musyoka, un ancien vice-président kényan, désormais dans l'opposition.
La tension montait déjà à l'approche du premier anniversaire du début des manifestations massives menées l'an dernier dans le pays contre un projet de hausse d'impôts et la corruption généralisée, qui avaient été réprimées dans le sang.
Bien que le gouvernement avait pris soin de ne pas augmenter les taxes directes dans la loi de finance à venir, la récente mort en cellule d'un homme de 31 ans, que la police avait initialement tenté de camoufler en suicide, a indigné une partie de la société.
Mardi, la police a annoncé dans un communiqué "l'arrestation immédiate et la traduction en justice" de l'agent ayant visé le vendeur de masques présumé. Elle a également, dans le même texte, "noté la présence d'un groupe de voyous dotés d'armes rudimentaires", dont elle a assuré qu'ils "seront traités avec fermeté".
- Lire aussi : le président William Ruto condamne la mort "déchirante et inacceptable" d’un détenu critique de la police
La deuxième journée de manifestations contre les brutalités policières en une semaine, après celle de jeudi dernier, s'est distinguée mardi par la présence de nombreux "voyous" violents, selon le terme employé par les médias kényans, visiblement chargés de disperser une foule de quelques centaines de personnes.
Un flou autour de l'identité des "voyous"
"Ils nous ont coincés et nous ont battus avec des fouets. La police se contentait de les regarder faire", s'est émue Hanifa Adan, l'une des principales voix des manifestations de 2024.
"Nous devenons un pays sans loi," a commenté à l'AFP, dépité, Ndungi Githuku, du groupe de défense des droits civiques Kongamano La Mapinduzi, qui s'est dit "choqué de voir les politiciens au Kenya, dirigés par le président, compter sur des voyous pour parvenir à leurs fins avec des fouets".
Une accusation régulièrement entendue depuis un an, alors que l'intervention de "voyous" a été documentée à plusieurs reprises pour encadrer ou réprimer des événements publics.
En juillet dernier, lors des manifestations anti-gouvernementales, les militants avaient accusé les autorités d'avoir recours à ces éléments violents pour discréditer leur mouvement. En mars dernier, les "voyous" ont vraisemblablement dépassé leurs prérogatives, selon la presse kényane, lorsqu'ils se sont mis à dépouiller scrupuleusement passants et magasins lors d'un déplacement du chef de l'Etat William Ruto dans Nairobi.
Ces derniers mois, Rigathi Gachagua, ancien vice-président de M. Ruto, devenu l'un de ses plus grands contempteurs, a affirmé à plusieurs reprises que celui-ci payait des "voyous" contre la jeunesse kényane.
L'un d'eux, tenant un bâton à proximité de policiers, a confirmé anonymement à l'AFP qu'il avait été recruté par des "leaders communautaires" et qu'on lui avait promis 1.000 shillings kényans (6,7 euros) en échange de sa présence mardi pour "protéger les commerces". "Je ne savais pas que cela tournerait comme ça", a-t-il poursuivi.
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