Reconnu coupable par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), l’État français a été condamné, jeudi 26 juin, pour un contrôle d’identité discriminatoire. La France a été jugée en violation de l’article 14, relatif à l’interdiction de la discrimination, ainsi que de l’article 8, portant sur le droit au respect de la vie privée et familiale, de la Convention européenne des droits de l’Homme. Dans le cas de Karim Touil, la Cour a estimé que le gouvernement n’était pas parvenu à réfuter le caractère discriminatoire du contrôle dont il a fait l’objet.
Paris est désormais tenu de lui verser 3 000 euros en réparation du préjudice moral.
Un long parcours
Entre 2011 et 2012, Karim Touil a rejoint un groupe de 13 hommes ayant dénoncé des contrôles jugés injustifiés, souvent accompagnés de palpations, d’insultes ou de tutoiement. Ces contrôles, considérés comme arbitraires, ont eu lieu dans plusieurs villes : Besançon, Vaulx-en-Velin, Roubaix, Marseille et Saint-Ouen.
En 2013, les plaignants subissent une première défaite en première instance, mais font appel. Cinq d’entre eux parviennent finalement à faire condamner l’État, qui est contraint de leur verser 1 500 euros de dommages et intérêts chacun.
Une reconnaissance individuelle
Cette décision inédite de la Cour établit que certains contrôles d’identité en France peuvent être motivés par des caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée, tout en niant qu’il s’agisse d’une pratique systémique et généralisée.
Karim Touil, quant à lui, espérait une reconnaissance plus forte ainsi qu’une réforme structurelle des pratiques de contrôle, notamment par la mise en place d’un récépissé permettant de tracer les interventions policières.
Entre 2016 et 2024, la proportion de personnes déclarant avoir été contrôlées par la police a nettement augmenté, passant de 16% à 26%, selon une enquête du Défenseur des droits. Les jeunes hommes perçus comme noirs, arabes ou maghrébins sont les plus exposés : ils ont quatre fois plus de risques d’être contrôlés que le reste de la population, et douze fois plus de risques d’être soumis à un contrôle poussé (fouille, palpation, ordre de partir).
Plus de la moitié des personnes contrôlées n’ont reçu aucune justification, et près d’une sur cinq déclare avoir subi des comportements inappropriés de la part des forces de l’ordre.
Ces constats s’inscrivent dans une tendance déjà documentée. Dès 2009, une étude du CNRS et de l’Open Society Justice Initiative montrait que les personnes perçues comme noires ou arabes étaient jusqu’à huit fois plus contrôlées que celles perçues comme blanches.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.