La Guinée-Bissau, un pays marqué par cinq coups d’État et 17 tentatives

Actus. Alors que la Guinée-Bissau devait connaître le nom de son futur président, ce jeudi 27 novembre, l’armée a annoncé, mercredi 26 novembre, prendre le contrôle du pays et interrompre le processus électoral. Les deux favoris, le président sortant Umaro Sissoco Embalo et Fernando Dias da Costa, qui avaient revendiqué leur victoire, ont été arrêtés par l’armée. C’est le cinquième coup d’État dans l’histoire du pays.

La Guinée-Bissau, un pays marqué par cinq coups d’État et 17 tentatives
Umaro Sissoco Embalo a été destitué par l'armée, mercredi 26 novembre. - Facebook

“Le haut-commandement militaire pour le rétablissement de la sûreté nationale et de l’ordre public décide de destituer immédiatement le président de la République (Umaro Sissoco Embalo, Ndlr)…”, déclare Denis N’Canha, le chef de la résidence militaire présidentielle, à la RTGB, la chaîne nationale de Guinée-Bissau.  "Ce qui nous a poussé à le faire, c'est pour garantir la sécurité au niveau national et également rétablir l'ordre", ajoute le général, en parlant de  la découverte par les "renseignements généraux" d'un "plan visant à déstabiliser le pays avec l'implication des barons nationaux de la drogue"

La scène se passe l’après-midi du mercredi 26 novembre à Bissau, la capitale. Avant cette déclaration télévisée, des coups de feu avaient retenti aux alentours du palais présidentiel. 

Quant au président sortant, Umaro Sissoco Embalo il serait « en prison à l’état-major » aux côtés du « chef d’état-major et du ministre de l’intérieur ».

Le pays vient de vivre son cinquième coup d’État

Le pays vient de vivre son cinquième coup d’État, depuis l’indépendance du pays en 1973. Un seul président dans l’histoire du pays à mener son mandat de cinq à terme : c’était le prédécesseur d’Umaro Sissoco Embalo,  José Mario Vaz,  de 2014 à 2019. 

“La Guinée-Bissau est un pays qui a une histoire avec les coups d’État (...), explique Vincent Foucher, chercheur au CNRS et spécialiste de la Guinée-Bissau, à Africa Radio. Il est le seul pays d’Afrique de l’Ouest à avoir mené une lutte militaire victorieuse contre le pays colonisateur, le Portugal, cela a donné à l’armée un rôle fondateur et une légitimité historique particulière. Depuis, le pays ne cesse de s’interroger : quelle place pour l’armée ? » 

Un avis partagé par le chercheur Sumaila Jalo. Ce dernier, dans son article Guinea-Bissau, 30 years of militarized democratization (1991-2021), explique qu’elle intervient régulièrement dans la vie politique pour “restaurer l’ordre”

Les Forces armées révolutionnaires du peuple (Farp), branche militaire du Paigc (Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert), ont mené la guerre d'indépendance contre le Portugal de 1963 à 1974.

Avant le multipartisme de 1991, le pays était gouverné par le Paigc dans un régime à parti unique, d'abord sous Luís Cabral (1974-1980), puis par João Bernardo Vieira après le coup d'État militaire de 1980, avec les Farp dominant le pouvoir centralisé.

Certains militaires parlent de “révolutions populaires”, pour justifier les coups d’État de 2003, 2009 et 2012, ainsi que la guerre civile de 1998-1999, et voient leurs interventions comme des réponses nécessaires aux crises institutionnelles et à l'inefficacité des gouvernements civils, explique le chercheur dans son article. 

Mais les motifs de coups d’État demeurent variés, détaille-t-il : les rivalités internes à l’armée, les désaccords idéologiques, le mécontentement quant aux conditions dans l’armée (salaires, favoritisme), les crises économiques, mais aussi des intérêts liés aux trafics illégaux, notamment le trafic de drogue. Selon certains observateurs, la Guinée-Bissau est devenue une zone de transit entre l'Amérique latine et l’Europe. 

“L’opposition, affirme qu’il s’agit d’un faux coup d’État..."

Des responsables militaires ont souvent été cités dans le trafic de cocaine, ces dernières années. Le fils d'un ancien président de Guinée-Bissau, Malam Bacai Sanha Jr, a été condamné en mars 2024 à plusieurs années de prison aux Etats-Unis pour son implication dans un trafic international d'héroïne. 

Concernant les raisons du coup d’État du mercredi 26 novembre, deux versions circulent, selon Vincent Foucher : “l’opposition, affirme qu’il s’agit d’un faux coup d’État orchestré pour interrompre le processus électoral, et le récit présidentiel parle d’une réaction à une menace de putsch, encore très vague à ce stade.”

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