Mi-2016, Vunduzi, situé au pied de la montagne de Gorongosa (centre), ressemblait à un village fantôme.Sur la place centrale du marché, une poignée d'échoppes étaient encore ouvertes, pour approvisionner essentiellement les soldats en garnison.
Au moindre coup de feu, les habitants se précipitaient dans l'épaisse forêt alentour pour se cacher.Toutes les nuits, ils s'y réfugiaient encore pour échapper aux escadrons de la mort qui pourchassaient, kidnappaient, assassinaient les soutiens à la Résistance nationale du Mozambique (Renamo).
Mais depuis une trêve décrétée unilatéralement par Afonso Dhlakama fin 2016, la vie a repris ses droits à Vunduzi.
Plus de check-point militaire.Les motos, voitures et camions circulent librement. L'école, fermée en 2015, a rouvert.Les bâtiments publics ont été repeints.Le village a même été raccordé à l'électricité.
- Un coup de tonnerre -
Ici, le décès d'Afonso Dhlakama - mort des suites d'une maladie le 3 mai à Gorongosa - a fait l'effet d'un coup de tonnerre, laissant soudain planer l'incertitude sur l'avenir.
Car depuis quelques mois, Afonso Dhlakama et son rival, le président mozambicain Filipe Nyusi, avaient entamé des négociations de paix directes pour tenter de mettre un point final aux combats qui avaient repris en 2013.
Cette année-là, les hommes armés de la Renamo - l'ancienne rébellion transformée en parti politique à la fin de la sanglante guerre civile (1976-1992) - étaient repartis dans le maquis pour contester la mainmise du Front de libération du Mozambique (Frelimo), au pouvoir depuis 1975.
La mort d'Afonso Dhlakama "est un désastre", lâche un fonctionnaire du ministère de l'Agriculture à Vunduzi.
"Peut-être que toute cette confusion peut revenir.On ne sait pas.Ca va dépendre du comportement de ceux qui vont le remplacer", ajoute le jeune homme assis sur une moto.
Lui, comme plusieurs habitants interrogés par l'AFP, préfère garder l'anonymat.Dans ce bastion de la Renamo, la suspicion et la peur demeurent.
Les fidèles d'Afonso Dhlakama "ne se montrent pas pour ne pas être persécutés", assure un enseignant.
En tant que fonctionnaire, cet homme d'une trentaine d'années est encarté au Frelimo et doit reverser chaque mois 1% de son salaire au parti, soit 50 meticais (0,7 euro)."Je ne donne pas de bon coeur, confie ce partisan de la Renamo, mais je donne pour ne pas être embêté."
- 'Battus jusqu'à la mort' -
"Avec la disparition de Dhlakama, on a ce doute dans le coeur. On se demande comment va évoluer la situation politique.Est-ce que ses hommes vont reprendre les armes ?", s'interroge Ricardo Armando, qui tient une petite échoppe sur le marché.
"Ce dont on a besoin, c'est qu'ils soient démobilisés pour résoudre la situation politique une bonne fois pour toutes", ajoute ce père de famille.
Un peu plus loin, Santo Gerente, un vendeur de vêtements, estime avoir repris une vie quasi normale depuis deux ans.
"On est libre, on peut s'amuser, écouter de la musique", se réjouit ce trentenaire.
A la reprise des combats en 2013, il s'était réfugié pendant deux années dans la forêt avec femme et enfants.
Son grand-père a disparu, un proche de sa famille, un gamin de 7 ans, a été tué d'une balle, et il a dû interrompre ses études.
Mais depuis la trêve, les escadrons de la mort ne font plus régner la terreur, poursuit l'enseignant."Ici, ceux qui posaient problème, c'étaient nos militaires, affirme-t-il.Ils ont vandalisé beaucoup d'échoppes, ils cassaient la porte, entraient et prenaient ce qu'ils voulaient."
Les autorités "accusaient toujours la population de passer des informations et de la nourriture à la Renamo, donc en représailles ils les battaient jusqu'à la mort".
Le président mozambicain s'est engagé à refermer une bonne fois pour toute ce chapitre sanglant.Lors d'une cérémonie en hommage à Afonso Dhlakama mercredi, il a promis de "continuer sur le chemin" de la paix.
Des élections générales sont prévues en octobre 2019. "Même si personne ne vous le dira, vous verrez, ici, tout le monde votera pour la Renamo", affirme l'enseignant de Vunduzi.
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