Sabrina Abda, émue regarde les photos de son grand-père.
D’origine algérienne et âgée de 50 ans, Sabrina Abda travaille dans le milieu culturel. Son grand-père, ainsi que ses deux oncles ont manifesté dans les rues de Guelma, dans l’est algérien, le 8 mai 1945 pour demander plus de droits pour les Algériens. « A la fin de la journée, mes oncles ont été arrêtés par des policiers locaux, et ensuite, enfermés à la gendarmerie, puis torturés, et fusillés dans la caserne de Guelma. Mon grand-père a été arrêté un peu plus tard, il a été arrêté le 12 mai et enfermé également à la prison. Ensuite, le 14, vraisemblablement avec d’autres algériens, ils ont été fusillés en dehors de la ville » déclare Sabrina Abda.
Sabrina Abda avec une photo de son grand-père
Crédit : Nadir Djennad
Le père de Sabrina Abda lui a dévoilé la triste vérité sur sa famille le jour de ses 18 ans.
Elle entreprend, par la suite, des recherches pour connaître les circonstances de la mort de son grand-père et de ses oncles. Elle consulte pendant de nombreuses années des archives, et tombe sur plus de 700 documents, dont un qui la bouleverse. Elle apprend en 2023 ce qui est arrivé à son grand-père dans un document de police trouvé dans le bureau des archives coloniales à Aix en Provence, dans le sud de la France. « Il était cité avec d’autres algériens dans les gens qui ont été mis dans des charniers, le 14 mai 1945. Son nom figurait tout en haut de la liste, Amor Abda. Donc, cela a été un moment très douloureux parce que d’une certaine manière, j’avais enfin des renseignements sur mon grand-père. Mais de le retrouver avec d’autres camarades dans un charnier, c’était épouvantable en fait. Cela m’a traumatisée » affirme, très émue, Sabrina Abda.
Cette quête de la verité, Sabrina Abda la raconte dans un livre qui sortira en septembre prochain, et intitulé “ Ils ont assassiné mon grand-père en 1945 à Guelma” aux editions Arcane 17. Ce livre est le fruit de témoignages familiaux et de nombreuses recherches menées, avec son cousin Salim, dans les Archives nationales. Un témoignage intime et une enquête rigoureuse sur une histoire longtemps passée sous silence.
A l’occasion du 80ème anniversaire des massacres de Sétif, Guelma et Kherrata, Sabrina Abda souhaite que le gouvernement français reconnaisse officiellement cette tragédie
« Cela fait 80 ans qu’on attend cette reconnaissance des massacres, cela fait 80 ans que notre famille souffre, cela fait 80 ans que l’on se transmet de génération en génération ce traumatisme, et c’est assez, ça va, c’est trop. A 50 ans, j’ai encore ce traumatisme et cette émotion qui est toujours là » déclare t-elle.
« Exécuter des gens comme cela sans jugement ! Il y a quand même quelque chose qui s’appelle la loi, la justice, les tribunaux. Mais executer des gens comme cela qui n’ont pas d’armes, c’était un crime colonial. Donc je demande encore au président Emmanuel Macron de reconnaître les crimes qui ont été commis contre notre famille » ajoute Salim Abda, cousin de Sabrina, né à Guelma et arrivé en France en 2003.
Salim Abda avec une photo de son oncle.
Crédit : Nadir Djennad
Longtemps occultés en France, les massacres du 8 mai 1945 marquent encore profondément les descendants des victimes.
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