La peine de mort a été requise contre l'ancien président Joseph Kabila. Le procès s'était ouvert à la haute cour militaire le 25 juillet et s'est déroulé en l'absence de ce dernier. Joseph Kabila est jugé pour crimes de guerre, trahison et organisation d'un mouvement insurrectionnel. Ont également été requis contre l'ancien président 20 ans de prison pour crimes de guerre et 15 ans de prison pour complot. Ce n'est pas une peine définitive, c'est une peine requise, mais pensez-vous que la peine puisse changer ?
En principe, la cour ou la juridiction n'est pas liée par les réquisitoires du ministère public, de l'Auditorat général, mais à la manière dont on voit le déroulement de cette procédure depuis le début, on voit qu'il y a une volonté d’aller jusqu'au bout pour condamner Joseph Kabila, l'écarter définitivement de la scène politique et surtout le mettre hors d'état de nuire, pour que finalement ses capacités de nuisance et celles de tous ses partisans puissent disparaître définitivement et ne plus constituer une menace pour les régimes en place.
L'annonce a suscité de nombreuses réactions au sein de la classe politique et au sein de la population. Son parti, le PPRD, a parlé d'un procès bidon, d'un non-événement et a affirmé que c'est surtout un procès politique. Est-ce qu'effectivement ce procès est avant tout un procès politique ?
Oui, je pense que la nature même de la personne poursuivie politise davantage ce procès. Joseph Kabila, c'est un ancien président de la République. Il est aujourd'hui opposant. Il est aussi en même temps sénateur à vie et il jouit d'un statut protégé par une loi spéciale, la loi portant statut d'ancien président de la République. Donc, c'est un acteur politique.
Mais en réalité, lorsqu'on voit le déroulement de ce procès, il y a aussi raison de croire finalement que c'est plus un procès politique qu'un procès normal. Parce qu'on a vu que le procès a beaucoup plus tourné vers la nationalité de Kabila, qui a été remise en cause, vers le fait qu'il ne serait pas congolais.
Et donc ça politise davantage le procès parce que ça reprend une rhétorique du passé qui était utilisée par l'IDPS à l'époque dans l'opposition pour remettre en cause sa nationalité. Et donc ça, c'est très problématique, surtout que les preuves pour étayer les faits qui lui sont reprochés ne sont pas suffisantes.
On s'appuie seulement sur ces déclarations, qui auraient été arrachées par la torture à certaines personnes déjà condamnées. Et donc, cela reste très problématique dans ce cadre‑là et peut faire dire à certains acteurs, à juste titre, qu'il y a politisation de cette affaire.
Une autre question qui se pose, c'est le lieu où est jugé par contumace Joseph Kabila. Il s'agit de la Haute cour militaire. Quel est le rôle et le poids de cette institution et pourquoi est-il jugé par la haute cour militaire ?
La Haute cour, c'est la juridiction équivalente de la Cour de cassation qui est la juridiction compétente pour juger les sénateurs. Donc, Kabila étant sénateur, il ne peut être jugé que par la Cour de cassation. Or, il est poursuivi pour des faits qui rentrent dans la compétence de la juridiction militaire : tous les crimes que vous avez cités plus haut.
Et donc, c'est pour cette raison-là qu'il est poursuivi devant la Haute cour militaire. Mais ça reste très problématique puisque Kabila, bien qu'il ait commis des infractions militaires, reste un civil qui doit normalement être justiciable devant la Cour de cassation, qui est sa juridiction compétente et qui peut aussi juger ces crimes.
Et donc, le recours à la juridiction militaire renforce en fait le caractère répressif, pour montrer qu'on veut vraiment taper fort sur lui. Et c'est très dommage, parce qu'on aurait dû aller vers la Cour de cassation comme le prévoit la Constitution et le règlement intérieur du Sénat.
Il faut aussi rappeler que c'est aussi la conséquence des privilèges qu'il jouit en tant que sénateur. Ces privilèges de juridiction ne sont valables que devant la Cour de cassation, donc la plus haute instance.
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