Écoutez la VO de l'interview de Sarah Nawoya
Vous faites partie des trente femmes chercheuses africaines récompensées lors de la 16ᵉ édition du prix Jeunes talents l'Oréal–UNESCO Afrique subsaharienne Jeunes talents pour les femmes et la science, et vous êtes spécialisée en intelligence artificielle. Que représente l’intelligence artificielle pour vous ?
Pour moi, l’intelligence artificielle, c’est le fait de pouvoir compter sur des ordinateurs pour réaliser des tâches et apprendre des tâches qui, normalement, seraient faites par des humains. Cela nous permet d’automatiser des processus, d’améliorer l’efficacité et de réduire les coûts. C’est ainsi que je comprends l’intelligence artificielle.
Votre objectif est de lutter contre l’insécurité alimentaire, et vous avez développé un système à faible coût qui améliore la sélection des larves de mouches soldats noires, une source de protéines plus durable pour l’alimentation animale, et même humaine, n’est-ce pas ? Quel est ce système exactement ? Pouvez-vous donner plus de détails ?
Ce système vise à développer une solution d’IA à faible coût. Nous cherchons à mesurer et identifier un trait important chez la mouche soldat noire. Le trait que nous étudions est la longueur et le poids du corps, en particulier la prédiction du poids, car ce sont des éléments importants pour les éleveurs. Plus la larve est grosse, plus elle contient de protéines et de matières grasses. Le système extrait donc ces caractéristiques et automatise un processus qui, autrement, serait manuel : les éleveurs doivent sélectionner les plus grosses larves pour produire la génération suivante, afin d’obtenir un meilleur rendement. Cet outil permet d’automatiser cette sélection et d’identifier les larves les plus saines pour la reproduction.
Quand on pense à l’intelligence artificielle, on pense à l’IA générative comme ChatGPT, Gemini, Perplexity, etc. Quel aspect spécifique de l’intelligence artificielle utilisez-vous dans votre projet ?
Vous avez raison, on pense souvent à l’IA générative, mais dans ce projet j’utilise la vision par ordinateur. J’utilise des images en deux dimensions, comme celles que vous prenez avec votre téléphone, mais dans ce cas avec un mini-ordinateur appelé Raspberry Pi. Ensuite, j’utilise le deep learining pour analyser les images, repérer la larve, l’identifier et mesurer ses caractéristiques. Donc j’utilise la vision par ordinateur et le deep learning.
L’insécurité alimentaire est l’un des plus grands défis du continent, surtout avec le changement climatique et les conflits. Comment votre méthode peut-elle contribuer à la combattre ?
Je développe une solution pour favoriser la production à grande échelle de mouches soldats noires. C’est plus rentable de les produire en masse, mais les outils pour le faire manquent. C’est là que ma solution intervient : ces insectes permettent ensuite de fabriquer de l’aliment pour la volaille ou les poissons. Cela crée une source de protéines durable et contribue à la sécurité alimentaire. Leur production génère également très peu d’émissions de gaz à effet de serre.
Vous avez dit que votre solution d’IA est à faible coût. C'est-à-dire?
Le faible coût vient du fait que j’utilise un mini-ordinateur, le Raspberry Pi, qui coûte moins de 100 dollars. L’ensemble du système ne dépasse pas 200 dollars. De plus, nous envisageons qu’il puisse être alimenté par des énergies renouvelables, par exemple un petit panneau solaire, ce qui permet de l’utiliser presque partout. Et les intrants nécessaires sont également peu coûteux.
Quand on parle d’IA en Afrique, on la voit comme une opportunité. Certains pays sont en avance, mais quelles difficultés subsistent pour développer l’IA sur le continent ?
Les défis sont nombreux. Je vois par exemple des biais dans les modèles existants. Nous n’avons pas nos propres jeux de données adaptés au contexte africain. Il faut donc développer ces jeux de données et réduire les biais pour que l’IA reflète mieux la réalité africaine.
Qu’est-ce qui a déjà été réalisé et montre une évolution positive de l’intelligence artificielle en Afrique ?
On voit beaucoup de recherches sur l’utilisation de l’IA dans différents domaines comme l’agriculture et la santé, qui sont essentiels pour le développement du continent. Par exemple, des solutions pour suivre et prédire la météo, identifier les maladies des cultures, ou pratiquer l’agriculture de précision. Il y a vraiment beaucoup de travaux en cours.
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