Réélection d'Alassane Ouattara : "C'est le même scénario qu'en 2020", souligne le politologue Geoffroy-Julien Kouao

Alassane Ouattara a été élu avec 89,77 % des voix. Ce sont des chiffres provisoires qui seront confirmés dans quelques jours. Il a donc été élu dès le premier tour. C'était un scénario prévisible ?

Oui, c'était en ce sens que, face à Alassane Ouattara, les autres candidats, à savoir Jean-Louis Billon, Ahoua Don Mello, madame Simone Gbagbo et madame Henriette Lagou  ne faisaient vraiment pas le poids. Ce sont des personnalités politiques soutenues par des partis relativement modestes. À l'exception du PDCI-RDA de Tidjane Thiam  et du PPA-CI de Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara était le grandissime favori de cette élection.

Le taux de participation a atteint 50 %. Les principaux opposants, comme vous l'avez mentionné, Tidjane Thiam et Laurent Gbagbo, ne pouvaient pas se présenter. On peut donc parler d'une victoire en demi-teinte ? 

Bon, peut-être, mais dans tous les cas de figure, c'est le même scénario que celui de 2020. Lors de l'élection de 2020, M. Alassane Ouattara avait obtenu 94 % des suffrages exprimés, avec un taux de participation de 54 %. On voit donc que nous sommes dans le même scénario. À partir du moment où le taux de participation est égal ou supérieur à 50 %, je pense que la légitimité politique est du côté de M. Alassane Ouattara.

Aucun des deux principaux opposants, Tidjane Thiam et Laurent Gbagbo, ne s'est rallié derrière les candidats en lice. Était-ce une erreur de leur part ?

C'est une erreur de la part du PPA-CI et du PDCI-RDA, en ce sens qu'il y avait une véritable soif d'alternance au sein de l'opinion publique ivoirienne. Je pense certainement que, stratégiquement, le PDCI-RDA et le PPA-CI, réunis au sein du Front Républicain, auraient dû soutenir l'un des quatre candidats, ce qui aurait certainement donné un autre résultat. À défaut "d'un coup KO", on aurait peut-être eu un deuxième tour.

Malheureusement, M. Laurent Gbagbo et M. Tidjane Thiam n'ont pas voulu soutenir un candidat, encore moins mettre en place un plan B dans leur parti respectif.

En mars, notamment, 15 partis avaient lancé une plateforme intitulée Coalition pour l'alternance pacifique en Côte d'Ivoire. Et dans cette coalition, il y avait le PDCI, le parti de Simone Ehivet Gbagbo, pour ne citer qu'eux : est-ce qu'une candidature commune avec tous les partis de cette coalition aurait aussi changé la donne ?

Je pense qu'après 15 ans d'exercice du pouvoir, il est normal de constater quelques maladresses. Vous savez que gouverner, c'est aussi décevoir. Et on sentait au sein de l'opinion publique une véritable volonté d'alternance. C'est pour cela que la venue sur la scène politique de M.Tidjane Thiam avait suscité beaucoup d'espoir.

L'opposition aurait donc dû faire preuve de malice politique, de ruse politique et aller en rang serré, comme ce fut le cas au Sénégal. À défaut d'Ousmane Sanko, il y a eu un candidat B en la personne de M. Diomaye Faye. Et donc, à défaut d'une candidature unique, le PDCI-RDA et le PPA-CI auraient dû présenter une candidature de précaution. Malheureusement, ce ne fut pas le cas.

M. Alassane Ouattara est brillamment élu. Il va exercer le pouvoir pendant encore cinq ans. Espérons que cette gouvernance apporte le progrès et le bonheur pour la Côte d'Ivoire.