Des affrontements entre factions jihadistes rivales dans le nord-est du Nigeria ont fait quelque 200 morts dans la région instable du lac Tchad, ont indiqué ce lundi 10 novembre à l'AFP une source au sein des services de renseignement, un milicien et une source jihadiste. Les combats entre les jihadistes de Boko Haram et leurs rivaux de l'État islamique en Afrique de l'Ouest (ISWAP) ont éclaté dimanche 9 novembre à Dogon Chiku, sur les rives du lac Tchad, selon les mêmes sources.
Les deux groupes, qu'opposent des divergences idéologiques, s'affrontent depuis des années pour le contrôle de territoires.
"D'après le bilan que nous avons obtenu, environ 200 terroristes de l'ISWAP ont été tués dans les combats", a déclaré à l'AFP Babakura Kolo, membre d'une milice anti-jihadiste qui soutient l'armée nigériane. Un ancien jihadiste de Boko Haram, qui a renoncé à la violence mais suit l'activité jihadiste dans la région, a confirmé qu'"environ 200 combattants de l'ISWAP ont été tués dans les combats" et plusieurs de leurs armes saisies.
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Boko Haram a perdu quatre combattants, selon l'ex-jihadiste, qui a demandé à être identifié par son prénom, Saddiku, et vit à Maiduguri, la capitale de l'État de Borno, épicentre de l'insurrection. "Il pourrait s'agir du pire affrontement entre les deux groupes depuis qu'ils ont commencer à s'attaquer l'un l'autre", a souligné Saddiku.
De courtes vidéos consultées par l'AFP montrent plusieurs corps sans vie dans des pirogues, certaines étant remplies d'eau ensanglantée. Une source au sein des renseignements nigérians opérant dans la région a indiqué suivre de près les conséquences des affrontements, qui ont selon elle fait "plus de 150 morts". "Nous sommes au courant des combats, qui sont une bonne nouvelle pour nous", a ajouté cette source.
L'ISWAP et Boko, en guerre depuis 2021
L'ISWAP et Boko Haram s'affrontent dans de violents combats pour le contrôle de territoires depuis leur scission en 2016, due à des divergences idéologiques, notamment autour du lac Tchad. Le lac d'eau douce, qui s'étend sur le Nigeria, le Niger, le Cameroun et le Tchad, sert de refuge à Boko Haram et à l'ISWAP, qui l'utilisent comme base pour lancer des attaques dans ces quatre pays. - Affrontements réguliers
L'ISWAP, affilié à l'État islamique, s'est séparé de Boko Haram en 2016 et est devenu un groupe dominant. Des affrontements ont éclaté entre les deux factions peu après la scission, culminant avec la mort du chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, lors de combats dans son bastion de la forêt de Sambisa en mai 2021.
Certains combattants de Boko Haram ont alors rejoint l'ISWAP pour éviter d'être exécutés, d'autres se sont rendus aux troupes nigérianes, tandis que le reste a fui vers des îles situées du côté nigérien du lac Tchad, contrôlées par Bakura Buduma, le successeur de Shekau. Depuis la scission, les deux factions s'affrontent régulièrement, l'incident le plus grave étant le raid mené en septembre 2021 par Boko Haram contre l'île de Kirta-Wulgo, contrôlée par l'ISWAP, qui a entraîné des semaines de combats.
Depuis lors, Boko Haram a réussi à chasser l'ISWAP de la majeure partie du lac Tchad, que les deux groupes convoitent comme refuge contre les attaques militaires et comme source importante de revenus grâce à la pêche, l'agriculture, l'élevage et l'exploitation forestière.
L'insurrection jihadiste a fait plus de 40.000 morts et déplacé environ deux millions de personnes dans le nord-est du Nigeria
Une "guerre d'usure prolongée" pourrait affaiblir ces groupes et "faciliter leur élimination par l'armée", estime Khalifa Dikwa, expert indépendant et ancien professeur à l'université de Maiduguri. "Les combats entre les deux rivaux les occuperont et soulageront la pression sur la population civile", ajoute M.Dikwa.
L'insurrection jihadiste a fait plus de 40.000 morts et déplacé environ deux millions de personnes dans le nord-est du Nigeria, majoritairement musulman, depuis son déclenchement en 2009. Les violences des jihadistes se sont étendues au Niger, au Tchad et au Cameroun voisins, conduisant à la mise en place d'une force militaire régionale pour les combattre. Le président américain Donald Trump a menacé d'intervenir militairement au Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique, en raison de ce qu'il qualifie de "meurtres de chrétiens" par des islamistes radicaux.
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