Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté jeudi une résolution qui renforce la Mission de l'ONU en République démocratique du Congo en créant pour la première fois une force d'intervention chargée de "neutraliser les groupes armés" opérant à l'Est.
La résolution, mise au point par Paris, s'inspire des résultats de l'accord régional d'Addis Abeba du 24 février, censé pacifier l'est de la RDC en proie à des rébellions depuis deux décennies.
Le texte "condamne fermement la présence continue du (mouvement rebelle) M23 dans les environs immédiats de Goma" (est) et réclame que tous les groupes armés "déposent les armes".
La "brigade d'intervention" sera formée de trois bataillons d'infanterie, d'une compagnie d'artillerie et d'une compagnie de reconnaissance et de "forces spéciales".
Selon le patron des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Hervé Ladsous, elle comptera 3.069 hommes, venus d'Afrique du Sud, de Tanzanie et du Malawi, et sera opérationnelle d'ici juillet.
L'ambassadeur français à l'ONU Gérard Araud a souligné qu'il s'agissait d'une "innovation" répondant à une "demande expresse" des Africains.
Selon le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, la résolution "propose une approche nouvelle et globale en vue de s'attaquer aux causes profondes de l'instabilité à l'est de la RDC".
Le Premier ministre de RDC, Augustin Matata Ponyo s'est "réjoui" vendredi de la création de cette brigade.
"La RDC se réjouit de ce vote qui marque un tournant décisif pour le rétablissement de la paix et de la sécurité dans les Kivus", régions de l'est du pays, affirme M. Matata Ponyo dans un communiqué transmis à l'AFP.
Ainsi renforcée, la Mission de l'ONU --Monusco-- se voit désormais confier la tâche supplémentaire de "mener des opérations offensives et ciblées", seule ou aux côtés de l'armée congolaise, pour "stopper le développement de tous les groupes armés, (les) neutraliser et les désarmer".
Elle devra cependant "tenir pleinement compte de la nécessité de protéger les civils et de limiter les risques", note la résolution.
La brigade est créée "pour une période initiale d'un an et dans le cadre du plafond d'effectifs" de la Monusco, soit 19.815 hommes.Basée à Goma, elle restera sous l'autorité du commandant en chef de la Monusco.
Tournant
Sa création se fait "sur une base exceptionnelle et sans créer de précédent", souligne la résolution.
Des responsables de l'ONU estiment cependant qu'elle marque un tournant: c'est la première fois que des Casques bleus seront dotés d'une telle capacité offensive, surtout couplée avec l'utilisation --pour la première fois aussi-- de drones pour surveiller les frontières de la RDC avec le Rwanda et l'Ouganda.Ces deux pays sont accusés par des experts de l'ONU d'aider et d'équiper le M23, ce qu'ils démentent.
La brigade "sera un nouvel élément important dans la panoplie" des Casques bleus, a déclaré M. Ladsous.
"Le Conseil de sécurité et l'ONU s'engagent sur une voie inédite", a constaté l'ambassadeur britannique Mark Lyall Grant.
Kinshasa demandait depuis plusieurs mois le renforcement de la Monusco.
Mais le Guatemala et le Pakistan, qui ont des troupes dans la Monusco, redoutaient des représailles contre leurs Casques bleus.Les ambassadeurs de ces deux pays ont réitéré jeudi leurs inquiétudes.
Selon des diplomates, l'examen de cette résolution a été accéléré pour qu'elle puisse être adoptée avant que le Rwanda ne prenne la présidence tournante du Conseil le 1er avril.Le Rwanda a voté jeudi en faveur de la résolution, adoptée à l'unanimité des 15 membres du Conseil.
Le M23, un des principaux groupes rebelles actifs dans la région minière du Nord-Kivu (est), avait pris brièvement le contrôle de Goma, la capitale régionale, en novembre avant de se retirer.
Jusqu'à présent, la principale mission de la Monusco était la protection des civils.Mais elle avait été critiquée pour n'avoir pas réussi à stopper la progression du M23 et les exactions qui avaient suivi, de la part des rebelles et de l'armée congolaise.
L'ONU a donné mercredi à Kinshasa une dernière semaine pour agir contre les soldats de deux bataillons de l'armée accusés d'avoir commis au moins 126 viols en novembre.
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