Attendu depuis de longs mois, le témoignage de M. Zuma s'est largement limité à une plaidoirie pro domo de plus de deux heures, improvisée et souvent confuse.
"On m'a calomnié, on m'a présenté comme le roi des corrompus", s'est-il offusqué, dénonçant une "conspiration" et un "complot visant à (l')assassiner" qu'il a fait remonter à ses activités de chef des renseignements du Congrès national africain (ANC) pendant la lutte contre le régime de l'apartheid.
Jacob Zuma a même assuré avoir "survécu à plusieurs tentatives de (le) tuer" qu'il a attribuées, sans les nommer, à trois "organisations de renseignement".
Comme ses avocats, l'ancien chef de l'Etat a mis en cause l'impartialité de la commission devant laquelle il s'est présenté."Aux yeux de ceux qui dirigent les choses, cette commission doit être la tombe de Zuma", a-t-il accusé.
Englué dans les scandales, M. Zuma a été poussé à la démission en février 2018 et remplacé par le nouveau patron de l'ANC, Cyril Ramaphosa, qui a promis depuis de tourner la page calamiteuse de la corruption.
L'ancien chef de l'Etat, 77 ans, est soupçonné d'avoir généralisé le pillage des ressources de l'Etat, notamment en favorisant illégalement les affaires d'une sulfureuse famille d'hommes d'affaires dont il est proche, les Gupta.
- 'Mensonge !' -
Depuis un an, la commission anticorruption, présidée par le vice-président de la Cour constitutionnelle Raymond Zondo, a entendu des dizaines de ministres, élus, hommes d'affaires ou hauts fonctionnaires qui ont déballé au grand jour le linge sale de l'ère Zuma (2009-2018).
L'actuel ministre des Entreprises publiques Pravin Gordhan y a ainsi accusé l'ex-président d'avoir "autorisé un climat d'impunité permettant la corruption" et la "capture de l'Etat" par des intérêts privés.
M. Gordhan a chiffré à 100 milliards de rands (6 milliards d'euros) le montant des fonds publics détournés ces dernières années.
L'ancien chef de l'Etat a traité lundi toutes ces accusations par le mépris."Quelqu'un qui a témoigné avant moi ici a dit que Zuma avait vendu le pays aux enchères.C'est un mensonge !"
L'ancien président s'est aussi longuement expliqué sur ses relations avec les Gupta.
"Je n'ai jamais rien fait d'illégal avec eux, ils étaient juste des amis", a-t-il assuré en rappelant que les frères Gupta étaient aussi liés à ses prédécesseurs Nelson Mandela et Thabo Mbeki.
"Je me demande pourquoi (...) les gens pensent que ma relation avec eux n'était pas correcte alors qu'ils avaient des relations avec les autres", a relevé Jacob Zuma.
- 'Nous contrôlons tout' -
Il y a quelques mois, un ancien ministre, Mcebisi Jonas, a raconté devant la commission comment les frères Gupta étaient venus lui proposer en 2015 le maroquin des Finances en échange de son aide pour obtenir des contrats et d'un pot-de-vin de 600 millions de rands (près de 40 millions d'euros).
Selon M. Jonas, Ajay Gupta lui a alors affirmé sans détour: "Vous devez comprendre que nous contrôlons tout (...) et que le vieux (Zuma) fera tout ce que nous lui dirons de faire".
"Ca veut dire que je ne suis pas capable de faire mon travail (de président) et qu'il me faut quelqu'un d'autre (pour le faire) ?", s'est amusé lundi Jacob Zuma.
Une fois conclu son monologue, l'ex-président a commencé à répondre aux questions des avocats de la commission, avec moins de verve.
L'un d'eux l'a asticoté sur un coup de fil que le directeur des services de communication du gouvernement l'accuse de lui avoir donné pour appuyer une demande des frères Gupta de réserver l'intégralité de son budget à leurs seuls médias.
"Je ne me souviens pas d'avoir donné ce coup de fil", a balayé Jacob Zuma, "et qu'il ait eu lieu ou pas, je ne pense pas qu'il y ait eu là quoi que ce soit d'extraordinaire".
L'interrogatoire de Jacob Zuma se poursuit mardi.
Malgré toutes les accusations dont il fait l'objet, l'ancien président n'a toujours pas été formellement inculpé.
Il n'est pour l'heure poursuivi par la justice de son pays que dans une seule affaire de pots-de-vin versés en marge d'un contrat d'armement signé...il y a vingt ans.
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