Au bout de la rue se dresse un bâtiment gris et poussiéreux qui accueille près de 550 élèves.Ce jour-là, ils ont été mobilisés par leurs enseignants pour participer à une opération nettoyage et peinture de l'école, initiée par la "Mob-team".
Ce collectif de citoyens ivoiriens est soutenu par l'ONG My Own Business ("ma propre entreprise" en français, mais aussi "ça me regarde"), qui a donné ses initiales à ce groupe de lutte contre l'insalubrité.
Dans la cour et dans les salles, balais en main, les enfants traquent la poussière et les détritus.
"Il s'agit d'inciter chacun à prendre soin de sa communauté, de son environnement", explique Diane Douaye, coordinatrice du projet, entre deux coups de peinture sur les murs d'une salle de classe.Office manager dans une grande entreprise internationale la semaine, bénévole le samedi, elle raconte : "Il fallait bien commencer quelque part, et ça ne coûte pas cher de se baisser pour ramasser des déchets".
En ciblant les écoles, le collectif cherche à sensibiliser les enfants pour "planter la bonne graine, celle du civisme".
"Cela ne sert à rien que les autorités investissent pour payer des nettoyeurs si, derrière eux, les gens continuent de jeter leurs détritus dans la rue.Il faut que chacun prenne conscience de sa responsabilité", plaide Aïcha Diaby, co-fondatrice du projet.
A Abidjan, il est courant de voir des déchets jetés par la fenêtre des voitures directement sur la route ou des gens vider leurs poubelles ménagères dans les terrains vagues.Les petites décharges sauvages sont légion."Cela concerne tous les quartiers, même les plus chics ou résidentiels", témoigne Diane.
Avec ses 5 millions d'habitants et une urbanisation galopante, la ville peine à endiguer la prolifération de déchets ménagers qui polluent les rues et la lagune.Loin d'avoir disparu, les sacs en plastique, pourtant interdits en 2013, jonchent les caniveaux, terrains vagues, chemins et ruelles.
Les détritus empêchent souvent l'évacuation des eaux usées, provoquant souvent des inondations nauséabondes propices à des glissements de terrain parfois mortels.
- Pas "pour le buzz" -
"Nous voulons avant tout lutter contre cet incivisme pour tacler l'insalubrité", explique Diane."Nous ne pouvons pas rester assis sur un banc, en espérant que les choses changent d'elles-mêmes".
Chaque samedi depuis un an, les bénévoles balaient les rues, repeignent les façades, plantent des arbres pour redonner de la couleur aux quartiers d'Abidjan.
Au début, la "Mob-team" a dû faire face à la méfiance des habitants des quartiers."Ils pensaient qu'on était payé pour ça, qu'on venait pour le buzz...Nous avons prouvé le contraire en pérennisant cette action", se réjouit Aïcha.
Sur son tee-shirt, comme sur ceux des autres bénévoles, on peut lire ce slogan : "Un jour, Abidjan sera comme Kigali", la capitale du Rwanda.
"Après sa grave crise, Kigali a réussi à se relever et à devenir un modèle à la fois en termes de salubrité et de cohésion sociale", assure Adama Kéita, fondateur de My Own Business.
Les bénévoles sont fascinés par le modèle rwandais, érigé en "idéal" à atteindre.
"Regardez ce qui se passe ici aujourd'hui.Nous sommes de différentes ethnies, de différentes religions, de différentes nationalités, de différentes obédiences politiques...A travers ces activités bénévoles de salubrité, nous arrivons à nous accepter, à vivre ensemble, à mieux coopérer", estime Adama Kéita, en contemplant avec satisfaction le déroulement de l'opération nettoyage du jour, qui a réuni une vingtaine de bénévoles.
Jusqu'ici, les pouvoirs publics se sont contentés d'applaudir l'initiative de la "Mob-team".La Première dame Dominique Ouattara et la ministre de la Salubrité urbaine, de l'Environnement et du Développement durable, Anne Désirée Ouloto, se sont notamment déplacées sur les lieux des nettoyages pour féliciter l'ONG.
Le collectif espère désormais qu'un "cadre collaboratif" pourra être mis en place avec les autorités ivoiriennes.
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