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Au Nigeria, une jeunesse déterminée à changer l'issue de la présidentielle

Fred Oyetayo a déménagé l'année dernière en Grande-Bretagne.Mais à la veille de la présidentielle au Nigeria, cet entrepreneur de 29 ans a décidé de revenir au pays avec pour seul objectif de déposer samedi son bulletin dans l'urne.

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23 février 2023 à 9h21 par AFP

Abuja (AFP)

"Nous voulons tous le changement", lance ce Nigérian qui tient les dirigeants actuels et passés responsables des innombrables problèmes que traverse son pays, entre inflation galopante, pénuries et insécurité quasi-généralisée.

Dans le pays le plus peuplé d'Afrique, des millions de jeunes volontaires, créatifs et brillants continuent de rêver d'une nation qui, au lieu de les ralentir, les accompagne à réaliser leurs ambitions.

Près de 40% des électeurs inscrits pour l'élection ont moins de 35 ans et nombreux sont ceux qui espèrent peser dans cette élection qui doit désigner parmi 18 candidats un remplaçant au président sortant Muhammadu Buhari (80 ans).

"Nous avons les habituels terribles candidats, mais c'est la première fois que nous avons aussi une bonne personne", s'enthousiasme Temidayo Oniosun, 28 ans, fondateur d'une start-up dans l'industrie spatiale à Lagos.

Pour lui, la "bonne" personne c'est Peter Obi, un ex-gouverneur de 61 ans qui jouit d'une réputation d'homme intègre et séduit la jeunesse connectée et urbanisée du pays en lui promettant un "nouveau Nigeria".

Populaire, il a réussi à s'imposer comme un challenger crédible face à ses deux principaux rivaux, vétérans de la politique. 

Le parti au pouvoir (APC) a désigné Bola Tinubu, 70 ans, et le principal parti d'opposition (PDP) Atiku Abubakar, 76 ans, deux hommes d'affaires richissimes qui ont gravi les échelons politiques malgré diverses accusations de corruption mais sans jamais être condamnés.

- 26 millions d'étudiants -

Les jeunes aux parcours professionnels brillants ne sont pas les seuls à soutenir Peter Obi, il est également très populaire chez les étudiants qui représentent 26 millions des quelque 94 millions d'électeurs inscrits.

Sur le campus de l'université d'Abuja, la capitale, Brandon Okori et Daniel Ononaye sont inquiets pour leur avenir après des mois de grève des professeurs et un taux de chômage des jeunes avoisinant les 40%. 

"Sans aucun doute, je vais voter pour Obi", dit Brandon Okori.Son camarade renchérit: "Obi n'est pas là pour l'argent et le pouvoir comme les deux autres".

Pour cette élection, la Commission électorale a noté un pic des inscriptions.Sur 10 millions de nouveaux inscrits, 76% a moins de 35 ans.

Cet intérêt croissant s'explique notamment par l'éveil politique d'une partie de la jeunesse qui s'était révoltée en octobre 2020 lors d'un mouvement de protestation contre les violences policières. 

Violemment réprimé, il a toutefois insufflé l'espoir d'une possibilité de changement par les urnes.Une importante campagne de mobilisation pour s'inscrire sur les listes avait alors été lancée. 

Dans le nord du pays, musulman et conservateur, la popularité du candidat Peter Obi, un chrétien originaire d'Anambra (sud-est) peine toutefois à décoller.

"Qui est Peter Obi ? De quel Etat ? Anambra ? Je ne l'aime pas", dit Zahra Abba, qui étudie la biologie à l'Université de Maiduguri.

La jeune femme de 22 ans affirme qu'elle aurait voté pour le président Buhari s'il s'était représenté (ce que la Constitution interdit).Elle votera pour Atiku Abubakar, seul des trois favoris à être originaire du nord.

Dans l'Etat de Kano (nord), c'est le candidat Rabiu Kwankwaso (NNPP), ex-gouverneur, qui semble mobiliser la jeunesse. 

Mais ses chances sont infimes à l'échelle nationale. 

L'immense colère contre le parti au pouvoir (APC) pourrait favoriser dans cette région le principal parti d'opposition emmené par Atiku Abubakar. 

"Je ne veux pas voter pour quelqu'un qui pourrait perdre et donner la victoire au parti au pouvoir, donc je pourrais voter Atiku", dit Fakhrriyyah Hashim, 30 ans."Mais je pourrais voter Obi, cela dépend de leurs chances dans les prochains jours", ajoute cette travailleuse sociale.

A Lagos, de nombreux jeunes voient les résultats de cette élection comme un tournant."Beaucoup de mes proches ont décidé de quitter le Nigeria si le bon candidat ne gagne pas", affirme l'entrepreneur Fred Oyetayo.


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