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De la France à la Libye de Daesh, itinéraire d'un couple jugé aux assises

"Il fallait que j'aille en Syrie", que "je vive sous la charia". Devant la cour d'assises spéciale de Paris, Chaïb Attaf raconte comment il a rejoint le groupe Etat islamique en Libye en 2016, entraînant femme et enfants dans ce qui sera "un enfer".

AFRICA RADIO

9 mars 2023 à 20h21 par AFP

Sur les quelque 1.400 Français ayant rallié les territoires contrôlés par Daesh recensés par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI, renseignement), onze tenteront de se rendre en Libye, sept y parviendront. Parmi eux, Chaïb Attaf, 42 ans aujourd'hui, et sa compagne Dounia Bentefrit, 41 ans. Jugé depuis lundi, notamment pour association de malfaiteurs terroriste, ce fils d'un ouvrier marocain identifie plusieurs "déclics" de son adhésion à l'idéologie jihadiste. Quoique "bien intégré" dans son village d'enfance, ce natif d'Auxerre, au sud de Paris, mentionne d'abord "les oeillères de la campagne" où il y avait peu de musulmans. Une rupture professionnelle alors qu'il est technicien, due selon lui à sa barbe, marque ensuite "le début de la fin", explique-t-il. Les débats "usants" sur les musulmans conforteront son sentiment de rejet ressenti dès 1989 et les premiers débats en France sur le port du foulard à l'école. Quand les Printemps arabes éclatent en 2011, le fan de rap cesse d'écouter de la musique. Il "avale" des discours de "savants", s'abreuve sur le forum Ansar al-Haqq et s'enferme, selon ses mots, dans "un eldorado islamique". En mai 2014, Chaïb Attaf est intercepté à Antakya, en Turquie, et renvoyé en France. "Il fallait que j'aille en Syrie, que j'apporte ma pierre, je partais un peu à l'aveuglette", assure-t-il. Trois mois après la levée de son assignation à résidence décidée après les attentats du 13 novembre 2015, Chaïf Attaf, sa compagne et leurs deux enfants en bas âge quittent en mai 2016 Louvroil, dans le nord de la France, pour Bruxelles puis le Maroc. S'en suit un périple de plusieurs jours en bus, voiture et à pied à travers l'Algérie, qui leur coûte 5.000 euros. Lui reçoit un entraînement militaire et dit errer dans le désert, traité comme de "la chair à canon" par des "Libyens nationalistes" et un groupe EI "plus mafia que califat". Le jugement est attendu vendredi.