Trois ressortissants étrangers - deux Belges, un Vietnamien - et un Kenyan sont jugés par la Haute Cour de Nairobi ce mercredi 7 mai. Accusés de biopiraterie et de trafic d’êtres vivants par le Kenya Wildlife Service (KWS), ils encourent une peine de cinq ans d'emprisonnement ainsi qu’une amende de plusieurs milliers de dollars. Les deux européens ont été interpellés dans une pension près du lac Naivasha avec plus de 5000 fourmis reines vivantes en leur possession dont l'espèce des Messor cephalotes. La valeur estimée de leur "butin" approcherait les 7 700 dollars.
Mais qu’est-ce que la biopiraterie ?
Pour les autorités kenyanes, leurs actes relèvent de la biopiraterie. Ce terme, souvent utilisé pour dénoncer la marchandisation du vivant, a été popularisé en 1993 par Pat Mooney, militant écologiste et fondateur de l’ONG ETC Group. La biopiraterie désigne l’appropriation illégitime de ressources biologiques et des connaissances traditionnelles d’une communauté locale, sans son consentement, à des fins commerciales. Ces pratiques spoliatrices peuvent avoir des conséquences lourdes : une fois marchandisées par des entreprises privées ou des laboratoires, les ressources naturelles échappent à leurs pays d’origine, privant les populations locales de leur patrimoine biologique et de leurs savoirs.
À lire : Kenya. Interpellés en possession de plus de 5 000 fourmis reines vivantes : quatre hommes jugés dans un procès inédit
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— AntHunterPoland (@AntPoland) June 17, 2023
Au Kenya, ces types de vols sont encadrés par plusieurs textes de loi. Selon le Kenya Wildlife Conservation and Management Act de 2013, toute personne qui détient, exporte ou transporte des espèces sauvages sans autorisation s’expose à une peine pouvant aller jusqu’à 30 ans de prison et une amende de 20 millions de shillings kényans (environ 153 000 euros). Le pays a également ratifié la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), qui règlemente le commerce international des espèces animales et végétales.
Lutter contre le trafic d’espèces sauvages
Cette affaire intervient alors que le Kenya renforce depuis plusieurs années sa lutte contre le commerce illégal d’espèces sauvages. Longtemps considéré comme une plaque tournante du trafic d’ivoire et d’espèces protégées vers l’Asie et l’Europe, le pays a multiplié les saisies et les arrestations. Selon les Nations Unies, ces efforts commencent à porter leurs fruits : le braconnage des éléphants et des rhinocéros est en nette diminution depuis 2015.
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Le Kenya a également renforcé son arsenal juridique avec la mise en place de la Wildlife Crime Unit, une unité spécialisée dans la traque et la répression des crimes environnementaux. Le procès des quatre étrangers s’inscrit dans cette dynamique. L’affaire pourrait également relancer le débat sur la protection des insectes et des espèces moins emblématiques que les grands mammifères, mais tout aussi essentielles à l’équilibre des écosystèmes.
Pourquoi des fourmis ?
Certaines fourmis kényanes sont prisées par les collectionneurs ou utilisées pour la recherche scientifique. Leur organisation sociale complexe, capacités d’adaptation ou caractéristiques biochimiques exploitables en pharmacologie ou agriculture intéressent. En dehors des circuits officiels, leur commerce reste interdit et constitue un délit sévèrement puni par la loi kényane.
Le verdict est attendu d’ici la fin de la semaine. Il pourrait constituer un précédent important dans la lutte contre la biopiraterie au Kenya et en Afrique de l’Est.
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