Zimbabwe : les massacres de “Gukurahundi”, le document pour comprendre

Actus. Dans une semaine, les audiences sur les massacres de “Gukurahundi” commenceront au Zimbabwe. Près de 20 000 civils de la minorité ndébélé avaient alors été tués dans l'ouest du pays, peu après l'indépendance vis-à-vis de la Grande-Bretagne en 1980.

Zimbabwe : les massacres de “Gukurahundi”, le document pour comprendre
Emmerson Mnangagwa, président du Zimbabwe. - Flickr

Trente-huit ans après la fin des massacres dits “Gukurahundi”, le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa a annoncé dimanche 15 juin l'ouverture des audiences pour jeudi 26 juin. En cinq ans, 20 000 personnes ont été massacrées au Zimbabwe. Un bilan corroboré par plusieurs organisations non gouvernementales et par le Haut-Commissariat des Nations unies.

Les tensions politiques se transforment en massacres 

À l’indépendance du pays d’Afrique australe en 1980, des tensions divisent la population. D’un côté, il y a l’Union nationale africaine du Zimbabwe - Front patriotique (ZANU-PF), dirigée par Robert Mugabe, issu de l’ethnie majoritaire shona. De l’autre, l’Union du peuple africain du Zimbabwe (ZAPU), composée principalement de militants ndébélés, un groupe ethnique minoritaire dirigé par Joshua Nkomo.

La pression s’intensifie entre les branches militaires de ces partis : respectivement l’Armée de libération nationale africaine du Zimbabwe (ZANLA) et l’Armée révolutionnaire populaire du Zimbabwe (ZIPRA).

Début 1982, les autorités répriment les forces de la ZIPRA dans l’ouest du pays, au Matabeleland. Les forces spéciales de la Cinquième Brigade sont déployées par le Premier ministre Robert Mugabe (1980-1987 puis président du Zimbabwe de 1987 à 2017). L'opération fut baptisée "Gukurahundi", un terme de la langue shona majoritaire qui peut être traduit par "la première pluie qui lave l'ivraie".

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Cette unité, formée en Corée du Nord, a mené des attaques contre des militants et des responsables de la ZAPU. L’année suivante, la violence se déchaîne au Zimbabwe. Les tensions politiques se transforment en massacres. Torture, enlèvements, violences sexuelles, destructions d’habitations : près de 20 000 personnes perdent la vie entre 1983 et 1987.

Une initiative lancée en 2024

Robert Mugabe n'a jamais reconnu sa responsabilité. En 2015, des documents déclassifiés des services de renseignement australiens ont révélé que le massacre avait été planifié par la ZANU-PF, le parti de Robert Mugabe, pour éliminer toute opposition politique. Ils indiquent aussi que Mugabe était non seulement au courant des exactions de cette brigade, mais qu’elle agissait sous ses ordres.

L'actuel président, Emmerson Mnangagwa avait annoncé en juillet 2024 que les survivants seraient interrogés lors d'une série d'audiences dans les villages, un processus de réconciliation visant à régler griefs et tensions datant de plusieurs décennies."Cette initiative est un symbole puissant de notre volonté collective d'aplanir les divisions qui nous séparent depuis trop longtemps", avait-il alors déclaré, qualifiant le processus de "pèlerinage vers la guérison".

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Intégration des chefs traditionnels

"Les audiences débuteront le 26 juin" et seront présidées par des chefs traditionnels et un panel de membres de la communauté, a annoncé dimanche le chef Fortune Charumbira lors d'une conférence de presse à Bulawayo (sud-ouest), dans la région du Matabeleland où les massacres ont été commis.

"Notre approche est centrée sur la victime", a-t-il assuré, en précisant que les audiences seraient fermées aux médias du fait de la sensibilité et de la "nature privée" de certaines histoires. Après avoir pris le pouvoir en 2017, Emmerson Mnangagwa a promis un processus de réconciliation et a mis en place des groupes de chefs traditionnels locaux pour enquêter sur ces massacres.

Sans excuses officielles du gouvernement, certains activistes ont alors jugé que le processus démarrait mal.

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