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Burkina: des ONG dénoncent des "exécutions extrajudiciaires de plus de 40 personnes", démenti du gouvernement

Deux organisations de défense des droits humains ont dénoncé les "exécutions sommaires et extrajudiciaires" de "plus de 40" personnes" perpétrées début août à Tougouri, dans le nord du Burkina Faso, impliquant, selon elles, les forces armées burkinabè, dans deux communiqués publiés dimanche.

AFRICA RADIO

14 août 2022 à 20h36 par AFP

Le gouvernement a "réfuté" ces "allégations" tout en indiquant que l'armée avait engagé "une enquête pour vérifier la véracité et l'exactitude de ces allégations". "Le collectif contre l'impunité et la stigmatisation des communautés (CISC) a été saisi depuis le lundi 08 août par plusieurs témoins et parents de victimes de la commune de Tougouri, plus précisément dans le village de Taffogo dans la région du Centre-Nord, de plusieurs cas d'enlèvements suivis d'exécutions sommaires et extrajudiciaires", indique cette organisation de défense des droits humains dans un communiqué. "Au total, plus de 40 corps ont été retrouvés plus tard le long de la route Taffogo - Bouroum", selon le CISC, précisant que "ces personnes tuées avaient toutes les mains ligotées et les yeux bandés". Selon l'organisation, des témoignages concordants décrivent "les présumés auteurs de ces enlèvements suivis d'exécutions systématiques comme étant des éléments des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) habillés en tenues noires et encagoulés". Estimant, de son côté, à "plus d'une cinquantaine de civils sans armes" qui ont "été enlevés à Tougouri et sommairement exécutés sur la route de Bouroum par les FDS", l'observatoire de la dignité humaine (ODH) a "condamné avec la dernière énergie ces actes barbares indignes de notre époque". Selon l'ODH, citant des sources locales, "la quasi totalité des victimes seraient des Peuls, dont des femmes et des enfants. Certaines victimes ont été arrêtées au marché de Tougouri et d'autres à domicile". "Les autorités sont vivement interpellées sur la résurgence de ces pratiques iniques, barbares, indignes d'une armée républicaine et qui ont contribué à plonger le Burkina Faso dans cette situation" de crise sécuritaire, a indiqué cette organisation. Le collectif a invité "certains éléments des FDS à arrêter la pratique d'enlèvements de civils à mains nues suivis d'exécutions sommaires et extrajudiciaires sous le prétexte fallacieux de lutte contre le terrorisme". Il appelé le chef de l'État à "recadrer l'action de ces soldats qui résument la lutte antiterroriste à une simple extermination des villages occupés par une communauté précise". "Le gouvernement réfute et condamne, avec la dernière énergie, ces allégations qui portent le discrédit sur l'armée qui reste républicaine et résolument engagée dans la lutte contre le terrorisme et pour garantir la quiétude et la sécurité des populations", a déclaré à l'AFP son porte-parole, Lionel Bilgo. "L'armée a engagé déjà une enquête pour vérifier la véracité et l'exactitude de ces allégations. Si toutefois elles sont fondées, l'armée (...)tirera toutes les conséquences", a assuré M. Bilgo, par ailleurs ministre de l'Éducation nationale. Dans un communiqué publié fin juin, l'armée avait "rappelé à l'ordre quelques uns de ses éléments y compris des volontaires pour la défense de la patrie (supplétifs civils) au respect des principes de l'armée", a souligné M. Bilgo. Régulièrement accusée d'exécutions extrajudiciaires, l'armée burkinabè a toujours démenti, pointant parfois des groupes armés qui utilisent du matériel militaire. D'autres ONG dont Human rights Watch (HRW) avaient déjà accusé en 2020 les forces de sécurité burkinabè d'"exécutions extrajudiciaires", au cours d'opérations antiterroristes, après la découverte de "fosses communes contenant au moins 180 corps" à Djibo, chef-lieu de la province du Soum, l'une des plus touchées par les attaques jihadistes. Ces violences ont fait dans le pays plusieurs milliers de morts depuis 2015, et contraint près de deux millions de personnes à fuir leur foyer.