Les 27 et 28 juin, deux ministres proches du président camerounais, Paul Biya, Bello Bouba Maigari et Issa Tchiroma, ont décidé de démissionner afin de se présenter à l'élection présidentielle d'octobre prochain. Il y a eu également d'autres démissions. Certains observateurs se demandent si c'est la fin d'une ère. Selon vous, est-ce vraiment le cas ? Est-ce la fin d'une ère ?
Justement, je pense que ces démissions sont importantes, très significatives, parce qu'il s'agit de personnalités qui ont exercé des fonctions ministérielles pendant des décennies et qui connaissent vraiment de l'intérieur le fonctionnement, sinon la mal gouvernance que le Cameroun a vécue depuis le début.
Le fait que, par le passé, ces ministres, avec leurs militants, ont toujours soutenu le président et qu'aujourd'hui, ils se démarquent de sa politique et de la politique du parti au pouvoir est une démonstration que, quelque part, eux-mêmes tirent la conclusion que ce n'est plus nécessaire, ce n'est plus important de maintenir cette alliance avec le parti au pouvoir et avec monsieur Biya.
Les deux ministres disent vouloir rompre avec les années Biya. Mais comment, de son côté, Issa Tchiroma, qui a été ministre de la Communication et a aussi occupé des postes dans d'autres ministères, et l’autre, qui a été Premier ministre de Paul Biya — je parle ici de Bello Bouba Maigari—, peuvent-ils incarner cette rupture ?
Les Camerounais auront la possibilité de juger de la sincérité de leur prise de position pendant les quatre mois qui restent avant l'élection présidentielle.
Mais le fait que ces ministres se démarquent déjà publiquement, dans leurs déclarations, dans leurs écrits, et par leur démission, de la politique du gouvernement actuel mérite quand même d'être salué.
Donc, je pense qu'avec le temps, on verra effectivement s'ils sont prêts à se mettre au travail pour que le Cameroun connaisse un véritable changement ou bien s'ils sont guidés par des calculs personnels et égoïstes.
Je crois que cela se révélera dans les quatre mois qui restent.
Ces deux anciens ministres ne font pas partie du parti présidentiel, le RDPC. Issa Tchiroma fait partie du FSNC, et le second fait partie de l'UNDP. Ce sont des partis très minoritaires à l'Assemblée, puisque, dans tous les cas, que ce soit au Sénat ou à l'Assemblée nationale, c'est le RDPC qui détient la majorité absolue. Finalement, ces deux démissions ne fragilisent pas le RDPC ?
Non, je crois que ce serait peut-être une analyse un peu superficielle, pour deux raisons. D'abord, parce qu'on connaît comment les élections s'organisent au Cameroun, et qu'une représentation, même dans une institution comme l'Assemblée nationale, n'est pas forcément le reflet du niveau de popularité des différents acteurs et des différents partis politiques sur le terrain. Deuxièmement, nous savons que ces deux personnalités proviennent du Grand Nord du Cameroun. C'est un électorat qui pèse.
Et même si cet électorat est minoritaire par rapport à celui du RDPC, il a toujours voté avec le RDPC par le passé, lors des élections présidentielles.
Donc, le fait de se démarquer du parti au pouvoir signifie que ce dernier serait contraint de faire campagne dans cette zone, d’entrer en compétition, ce qui va fragiliser, dans tous les cas, le parti au pouvoir, qui, par le passé, avait l'habitude de recevoir les voix de tout cet électorat sans compétition.
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