Dès le début de la guerre d'Algérie, en 1954, Frantz Fanon s'engage auprès des nationalistes algériens, tout en continuant d’exercer la psychiatrie, et noue des contacts avec certains officiers de l'Armée de libération nationale ainsi qu'avec la direction politique du Front de libération nationale (FLN), Abane Ramdane et Benyoucef Benkhedda en particulier. A partir de 1956, il s’engage totalement pour la cause algérienne. « C’est important de souligner qu’il démissionne de son poste de médecin, on est donc à l’automne 1956. Il a déjà à ce moment-là pris contact avec un certain nombre de membres du FLN et il va ensuite partir à Tunis ou était installé donc une antenne du FLN. Il va depuis Tunis participer au combat en écrivant dans le journal du FLN El Moudjahid pour, justement, accompagner la révolution sous un pseudonyme. Et en devenant également à la fin des années 50, début 60, ambassadeur du gouvernement provisoire de la République algérienne à Accra, ambassadeur itinérant pour l’Afrique sub-saharienne » selon Amzat Boukari-Yabara, historien, spécialiste du Panafricanisme, auteur notamment de Africa Unite, aux éditions La Découverte.
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Un héros pour les Algériens
S’affirmant désormais « algérien », Frantz Fanon signe quelques-uns des textes les plus influents du mouvement anticolonialiste, comme Les Damnés de la Terre en 1961, préfacé par Jean-Paul Sartre. Il meurt d’une leucémie à Washington le 6 décembre 1961, sans voir l’indépendance algérienne pour laquelle il a tout donné dans les dernières années de sa vie. Pour de nombreux Algériens, Frantz Fanon est un héros. « Frantz Fanon fait aussi bien partie de l’histoire de l’Algérie. Il a défendu l’indépendance. C’était vraiment une personne infiniment respectable “ déclare Anissa Boumediene, écrivaine, avocate et ancienne première dame d'Algérie. Elle était l’épouse du président Houari Boumediene, qui a dirigé le pays de 1965 à 1978.
Anissa Boumedienne/crédit : Nadir Djennad
Son rôle durant la guerre de libération et son œuvre sont méconnus des jeunes algériens
Un timbre algérien à l'effigie de Frantz Fanon
Trois hôpitaux portent son nom
En hommage à son travail en psychiatrie et à son soutien à la cause algérienne, trois hôpitaux en Algérie, dont l'hôpital psychiatrique de Blida, où il a travaillé, portent son nom. Mais ce n’est pas assez étant donné l’importance du personnage selon Arezki Aït Ouazou, ancien militant algérien pour l’indépendance. Il était l’un des responsables de la Féderation de France du FLN « En Algérie, à Alger, il y a des rues qui portent son nom, il y a une bibliothèque qui porte son nom, mais ce n’est pas assez pour Fanon pour ce qu’il a fait, pour ce qu’il représente parce que c’est un symbole pour la lutte des peuples, pour la liberté et l’indépendance. Pour nous, c’est un héros de la guerre de libération, de la révolution algérienne » affirme Arezki Aït Ouazou
"Son nom ne dit pas grand chose aux jeunes générations"
Pour perpétuer la mémoire de Frantz Fanon, le journaliste, écrivain et éditeur algérien Lazhari Labter, a publié les livres du militant anticolonialiste, et les a traduits en Algérie. Cependant, selon lui, la jeunesse ne connaît pas bien Frantz Fanon et son rôle durant la guerre d’Algérie « Les générations actuelles, avec le temps passant, ignorent l’histoire de leur pays et en particulier cette histoire-là. Et évidemment hormis des cercles très restreints, hormis les universités et les intellectuels, le nom de Fanon aujourd’hui ne dit pas grand chose aux jeunes générations, et cela peut être dû au manque d’enseignement de ses ouvrages, notamment au niveau des écoles, des lycées et des universités » affirme le journaliste et éditeur algérien.
Ecoutez Lazhari Labter
La tombe de Frantz Fanon à Aïn-Kerma en Algérie/crédit : wikimedia commons
100 ans après sa naissance, Frantz Fanon reste une voix essentielle des luttes anticoloniales. Dernièrement, les films "Fanon", sorti en avril dernier, de Jean-Claude Barny, et "Frantz Fanon" du réalisateur algérien Abdenour Zahzah de 2024, ont ravivé sa mémoire et sa pensée décoloniale.
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