L’écrivain et grand reporter revient sur le retour discret de Boualem Sansal en France, les tractations diplomatiques autour de sa libération, et alerte sur l’impact des coupes dans l’aide publique au développement qui fragilisent les ONG françaises.
Ecoutez Olivier Weber
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« Il est très fatigué » : un retour en France sous le signe de la discrétion
Olivier Weber, écrivain, ancien ambassadeur itinérant de France et président de l’ONG Douleurs Sans Frontières, n’a pas encore pu s’entretenir avec son ami Boualem Sansal depuis son retour en France.« Je n’ai pas pu lui parler, parce que Boualem est rentré de Berlin à Paris, en passant par l’Élysée, mais pour une visite très discrète. L’idée est de le laisser se reposer, de le laisser avec sa famille, il est très fatigué, épuisé par cette arrestation arbitraire et cette incarcération d’une année pratiquement, avec un cancer », explique-t-il.
🇫🇷🇩🇿 Boualem Sansal de retour en France: l'écrivain franco-algérien, qui se trouvait en Allemagne depuis sa libération de prison en Algérie, a atterri sur le sol français ce mardi et a aussitôt été reçu par Emmanuel Macron. pic.twitter.com/tfMsCzAXEs
— Agence France-Presse (@afpfr) November 18, 2025
Quant à une prise de parole prochaine de l’écrivain franco-algérien, Olivier Weber estime que cela viendra, mais « à son rythme ». « Bien sûr, c’est à lui de le faire… Même si, évidemment, il a été l’objet de tractations diplomatiques entre la France, l’Algérie et l’Allemagne. On sait très bien que le président Tebboune s’est fait soigner à deux reprises au moins en Allemagne : c’est un peu le cas idéal pour mener des tractations et pour sauver la face entre guillemets. Il y avait un coût quand même pour le régime algérien, un coût diplomatique, économique, social, dans cette relation bilatérale avec la France qui a été extrêmement malmenée, c’est la plus grave crise depuis l’indépendance de 1962. »
Diplomatie et rapport de force : « Les deux méthodes ont fonctionné»
La libération de Boualem Sansal a été qualifiée par le ministre Jean-Noël Barrot de « désaveu cinglant pour les partisans de la méthode forte » dans la gestion des relations avec Alger. Olivier Weber nuance : « Les deux attitudes ont fonctionné. Le côté diplomatique exprimé par le ministre Jean-Noël Barrot, le ministère français des Affaires étrangères, et aussi le rapport de forces. Je crois que les deux méthodes ont quand même fonctionné dans l’attitude à avoir avec le régime du président Tebboune. »
Pour lui, Boualem Sansal demeure un symbole puissant. « Je crois que Boualem Sansal est un porte-voix essentiel des écrivains, de la francophonie, des écrivains d’Afrique en général et d’Afrique du Nord en particulier. Bien sûr qu’il reste profondément attaché à son pays, mais vous savez, quand on aime un pays, on a le droit de contribuer, non pas à le critiquer, mais à dire : voilà ce qui ne va pas. »
« L’aide au développement doit perdurer » : un avertissement pour les ONG françaises
Dans une tribune publiée le 7 novembre au Figaro, Olivier Weber alertait sur les conséquences des coupes dans l’aide publique au développement (APD). Un sujet qu’il réaffirme avec vigueur. « C’est très important d’interpeller des gouvernements, le gouvernement français en particulier, sur la nécessité de réhausser les montants de l’aide publique au développement. »
Pour le président de Douleurs Sans Frontières, l’APD est vitale : « Tous ces mouvements humanitaires incarnent l’esprit de solidarité et d’entraide avec les pays du Sud. Nous sommes présents dans une demi-douzaine de pays — Haïti, Madagascar, Mozambique, Cambodge, Arménie… — et nous avons encore besoin d’aide publique au développement. »
Il met en garde contre une vision déséquilibrée de l’aide humanitaire : « Pour moi, ce qui est important, c’est aussi de contribuer à faire non pas du Nord-Sud, mais que les ONG du Nord puissent aider les ONG du Sud à faire du Sud-Sud. Il faut que les ONG locales puissent perdurer. »
Olivier Weber évoque aussi l’impact mondial de décisions abruptes : « Regardez ce qui s’est passé avec la fin de l’USAID décrétée par Elon Musk : c’est quand même 30 milliards de dollars d’aide par an, brutalement stoppés. C’est important de maintenir cette solidarité internationale. »
Avant de conclure : « Il est crucial que l’aide publique au développement perdure. »
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