Adapter "L’Etranger", roman culte d’Albert Camus, n’est pas un mince défi. Le cinéaste français François Ozon l’a relevé en présentant mardi 2 septembre à la Mostra de Venise sa propre vision du livre, où il revendique "un regard d’aujourd’hui sur cette histoire", celle de la colonisation française. Son film, en lice pour le Lion d’or, sortira en France le mercredi 29 octobre.
"Toutes les familles françaises ont un lien avec l'Algérie"
Si l’incipit célèbre du roman commence par "Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas", le film choisit une entrée radicalement différente : Meursault y déclare d’emblée avoir tué un Algérien. François Ozon explique aussi avoir intégré des "images d’archives qui nous expliquent quelle était la vision des Français sur l’Algérie" au temps de la colonisation, tandis que les personnages algériens prennent davantage de place que dans le livre.
Le réalisateur voit dans cette démarche une tentative d’introspection collective : "Je me suis rendu compte que toutes les familles françaises avaient un lien avec ce pays", affirme-t-il, jugeant que le travail historique reste insuffisant. Sa propre histoire familiale en témoigne : "Mon grand-père était juge en Algérie, il a échappé à un attentat et toute ma famille à l’époque est revenue en France. C’est une histoire que je connaissais très vaguement mais dont on ne parlait pas."
Entre héritage littéraire et défi cinématographique
Porté par un noir et blanc travaillé, une photographie sensuelle et l’interprétation de Benjamin Voisin dans le rôle de Meursault, le film conserve la dimension philosophique du roman en interrogeant hasard et sens de la vie. "C’est un grand défi de s’attaquer à ce livre, qui est un des livres français les plus lus au monde", souligne François Ozon.
Le cinéaste confie avoir rêvé de tourner en Algérie, comme Luchino Visconti l’avait fait pour son adaptation de 1967, mais il a dû se rabattre sur Tanger, au Maroc, évoquant les "relations compliquées" entre les deux pays. Financer le projet n’a pas été simple : "Tout le monde disait que c’était inadaptable", se souvient-il. C’est finalement Gaumont qui a permis de concrétiser ce pari audacieux.
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