Crise à Madagascar : “Les promesses non tenues incitent les jeunes à manifester” selon l’historien Jeannot Rasoloarison

Actus. Jeannot Rasoloarison est historien malgache, professeur d’Histoire à l'Université d'Antananarivo. Il était l'invité d'Africa Radio jeudi 09 octobre 2025 à 07h45.

Crise à Madagascar : “Les promesses non tenues incitent les jeunes à manifester” selon l’historien Jeannot Rasoloarison
L'historien malgache Jeannot Rasoloarison

Ecoutez Jeannot Rasoloarison

 

Alors que le président Andry Rajoelina tente d’apaiser les tensions en ouvrant un dialogue national, la « Génération Z » malgache refuse la main tendue du pouvoir et appelle à la grève. L’historien Jeannot Rasoloarison analyse les racines profondes de cette crise entre une jeunesse désabusée et un président fragilisé. 

Un dialogue présidentiel boudé par la jeunesse 

Mercredi 8 octobre, le président Andry Rajoelina a convié les “forces vives de la nation” à une réunion au palais présidentiel pour tenter de désamorcer les tensions qui secouent Madagascar. Environ 1 500 personnes — universitaires, syndicalistes, journalistes et personnalités publiques — ont répondu présentes. 
Mais un grand absent a marqué la rencontre : la jeunesse. La « Génération Z », en particulier, a refusé l’invitation et appelé à une grève générale dès le lendemain. Ce refus symbolise un fossé grandissant entre le pouvoir et une population jeune en quête de perspectives. 

“Ce qui préoccupe les jeunes, c’est l’emploi avant tout” 

Pour Jeannot Rasoloarison, historien et professeur à l’Université d’Antananarivo, cette mobilisation trouve ses racines dans un profond malaise social. 
“C’est une mobilisation qui s’inscrit dans un contexte économique et social très difficile, surtout pour les jeunes. Ce qui préoccupe les jeunes, c’est l’emploi avant tout alors qu’il n’y a pas beaucoup d’offres, notamment pour les jeunes diplômés. Les politiciens ont fait beaucoup de promesses au moment des élections, mais ces promesses non tenues incitent les jeunes à manifester.” estime Jeannot Rasoloarison.

Dans un pays où près de 70 % de la population a moins de 30 ans, le chômage et la précarité nourrissent la colère d’une génération connectée, informée, mais marginalisée dans les décisions politiques. 

Une contestation qui s’inscrit dans l’histoire 

Selon Jeannot Rasoloarison, les mobilisations actuelles s’inscrivent dans une longue tradition de mouvements étudiants et citoyens à Madagascar. 
“Le mouvement porté par la GenZ, ce n’est pas quelque chose de nouveau dans l’histoire politique malgache. Au début des années 1970, il y avait déjà eu un mouvement de jeunes étudiants et lycéens. Ils ont organisé des contestations pour s’opposer à un régime qui ne prenait pas en compte les aspirations des jeunes.” 
L’historien voit dans ces répétitions historiques un signe d’alerte : les frustrations de la jeunesse malgache sont cycliques, et les gouvernements successifs peinent à leur apporter des réponses durables. 

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Une initiative présidentielle perçue comme “une tentative de gagner du temps” 

Face à la montée de la contestation, le président Rajoelina cherche à reprendre la main par le dialogue. Mais pour l’historien, cette démarche reste insuffisante si elle ne s’accompagne pas d’actes concrets. 
“L’initiative du président Andry Rajoelina peut être interprétée comme une tentative de gagner du temps”, estime Jeannot Rasoloarison. 
Selon lui, seule une véritable concertation inclusive peut apaiser les tensions.

 “Pour un changement réel, il faut réunir tous les acteurs” 

Jeannot Rasoloarison plaide pour un processus collectif, loin des calculs politiques. 
“Pour aboutir à un véritable changement, il faut que tous les acteurs — politiques, économiques, jeunes — se réunissent autour d’une table. C’est à ce prix que l’on pourra trouver des solutions concrètes pour résoudre les problèmes de gouvernance, de corruption, et éviter que le pouvoir soit concentré entre les mains d’une seule personne.” 
Alors que Madagascar s’enfonce dans une crise économique et sociale, la voix des jeunes résonne avec de plus en plus de force. Leur refus du dialogue présidentiel n’est pas un désintérêt pour la politique, mais un cri pour une nouvelle manière de gouverner — plus juste, plus ouverte et plus fidèle à leurs espoirs. 



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