La marche du "million" à Khartoum pourrait être un test pour jauger la capacité à mobiliser des protestataires.Mais aussi pour le Conseil militaire de transition, qui tient les rênes du pays depuis la destitution en avril du président Omar el-Béchir.
Après la répression meurtrière le 3 juin d'un sit-in devant le siège de l'armée à Khartoum, les meneurs de la contestation sont confrontés à un important déploiement sécuritaire et au blocage d'Internet, un outil qui fut essentiel pour mobiliser des dizaines de milliers de personnes à partir des premières manifestations le 19 décembre.
Lancé par l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation, l'appel à manifester dimanche est le premier de cette envergure depuis la dispersion du sit-in.
Au moins 128 personnes avaient été tuées lors de cette opération et dans la répression des jours suivants, selon des médecins proches de la contestation.Les autorités ont évoqué un bilan de 61 morts.
"Je m'attends à un nombre important de manifestants dans les rues (dimanche), et c'est très possible que les forces de sécurité utilisent la force contre les contestataires", estime Moustafa, 25 ans, qui compte défiler.
L'ALC a dévoilé les trajets des cortèges à travers la capitale et dans la ville voisine d'Omdourman, qui doivent mener les manifestants jusqu'aux domiciles des "martyrs" tués le 3 juin.
La mobilisation de dimanche "sera une tentative du peuple de montrer que c'est lui qui a le dernier mot", estime Khaled al-Tijani, rédacteur en chef du journal Elaff.
- "Le monde observe" -
Dernièrement, les protestataires s'étaient contentés de petits rassemblements à travers la capitale, parfois dispersés par les forces de sécurité avec des gaz lacrymogènes.
Samedi soir, une conférence de presse organisée par un groupe de la contestation a été interdite par les forces de sécurité.
D'ores et déjà, le Conseil militaire a mis en garde l'ALC qu'il lui ferait porter "l'entière responsabilité" en cas de "perte humaine" ou de tout "acte de vandalisme" durant la marche.
Dans la capitale, les Forces de soutien rapide (RSF) sont stationnées à tous les coins de rue, lourdement armés.Ce sont ces paramilitaires qui sont accusés par les contestataires d'avoir mené la dispersion du sit-in le 3 juin.
Le Conseil militaire affirme ne pas avoir donné d'ordre en ce sens.Reconnaissant toutefois des "excès", il assure qu'il s'agissait à l'origine d'une opération antidrogue dans le secteur voisin de Columbia.
L'Union européenne et des défenseurs des droits humains ont appelé les militaires au pouvoir à la retenue dimanche.
"Il est du devoir du Conseil militaire de transition d'assurer la sûreté de tous au Soudan et de s'abstenir de tout recours à la violence contre les manifestants", a indiqué dans un communiqué la diplomatie européenne.
Pour Amnesty International, "le conseil militaire ne doit pas laisser le pays glisser vers plus de répression.Le monde observe".
Talal, jeune manifestant de 29 ans, s'attend toutefois à un recours à la violence de la part des autorités."Mais si quelques rassemblements assez grands peuvent avoir lieu à Khartoum, ils vont briser la barrière de la peur, et plus de gens vont descendre dans les rues les jours suivants", espère-t-il.
Malgré les tensions, contestataires et généraux se disent ouverts à une reprise des négociations, à travers une médiation de l'Ethiopie et de l'Union africaine, pour dessiner les grandes lignes de la transition à venir.
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